À l’aire d’accueil des gens du voyage aux Herbiers, je rencontre Mélissa. Le sapin de Noël est en place dans la caravane où elle vit avec son mari et ses trois enfants. Bientôt la famille va devoir se sédentariser pour des problèmes de santé d’un des enfants, mais aussi pour l’école. Un crève-cœur pour Mélissa qui a le sentiment d’abandonner ce qu’elle a toujours connu : l’itinérance.

Les mois d’hiver sont généralement ceux où il y a le plus de stabilité sur l’aire d’accueil. « Sinon, les gens ne restent pas sur place. Ils vont retrouver des membres de la famille sur d’autres aires en France ». Fini les terrains vagues gérés de façon anarchique. « L’aire est gérée par une société avec un gardien. Nous payons toutes nos charges. Et lorsqu’une famille part, elle veille à laisser propre son emplacement ». Elle tord le cou aux nombreux clichés dont on affuble les gens du voyage. « Le vol est contraire à nos règles de vie. La hiérarchie familiale est très respectée. Le plus souvent, c’est l’aîné qui prend les décisions, comme mes parents en ce qui me concerne ».

C’est dans la région des Herbiers qu’ils ont trouvé le pédiatre qui a le mieux suivi leur fils handicapé, après avoir consulté de très nombreux praticiens. « Du coup, on reste ici, et on va bientôt habiter une maison ». Un traumatisme quand on a toujours vécu en caravane. « Ça me prend à la gorge, mais il faut regarder les choses en face avec nos enfants. A cinq, on est obligé d’avoir une caravane complémentaire pour la cuisine, et parfois on fait des allers retours sous la pluie. Nous avons également notre plus grande fille qui va au collège. Elle nous ramène des résultats qui nous rendent heureux. C’est aussi pour leur avenir qu’il faut se sédentariser ».

Depuis son enfance, Mélissa a sillonné tout le pays. « De Paris à Soissons, de Reims à Deauville. On allait chez mes beaux-parents à Charleroi (mon mari est belge) et nous filions à Saint Tropez. L’avantage des caravanes, c’est qu’on part dès qu’on veut. Ça nous procure une vraie liberté ». En restant sur place, la famille reçoit pour le rassemblement de Noël. « On va être beaucoup plus nombreux pendant quelques jours. J’ai mon oncle qui vient de Lyon pour les fêtes ».

Noël est un évènement pour sa communauté chrétienne. « Nous respectons le cadre de notre mission évangélique. Pami les gens du voyage, on trouve des catholiques, qui vivent comme les sédentaires. Il y en a aussi qui se convertissent à l’Islam. Pour notre fils handicapé, nous avons regardé différentes religions ». La convention est le rendez-vous annuel qui rassemble le plus de monde. « Il vient des gens de toute l’Europe. Pendant les 3 mois d’été, il y a des réunions tous les soirs où on évoque la parole de Dieu, on chante ». Les évènements familiaux sont très suivis. « Quand ma grand-mère est décédée au mois d’août dernier, les gens sont venus de toute la France. Il a fallu ouvrir les champs pour les nombreuses caravanes ».

L’image que les médias envoient de la communauté des gens du voyage est peu fidèle à la réalité que connaît Mélissa. « Ici ce n’est pas Djobi, Djoba…Ces clichés m’agacent un peu. Les gens du voyage sont en très grande partie des gens normaux, sans histoire ». Pour le moment, elle s’apprête pour le réveillon du nouvel an. « On va terminer en beauté cette semaine de retrouvailles et de fêtes ! »