Il a tout juste 23 ans quand il est repéré par celui qui deviendra Président de la République. Originaire de la commune des Epesses, Jean Gaborit développe tôt une conscience publique assise sur les vertus d’un État régalien. Ni Sciences Po, ni écoles préparatoires à l’ENA ; Jean, trace sa voie avec une âme d’entrepreneur. En 2015, avec trois amis, il lance le mouvement « Les Jeunes avec Macron » qui lui ouvrira les portes de l’Elysée. Cette parenthèse politique se referme trois ans plus tard. Il est aujourd’hui retourné dans le privé.

C’est à Lannion, dans les Côtes d’Armor, que le jeune spicéen fait ses armes en communication. « J’ai suivi un cursus classique puis une licence que j’ai décidé d’interrompre pour partir en Irlande. A mon retour en France, c’est à la montagne que je trouve l’idée de créer une première entreprise visant à améliorer le recrutement des travailleurs saisonniers dans les stations de ski ». Une seconde aventure entrepreneuriale suivra l’année suivante. « Celle-ci était basée à Rezé ; je faisais du conseil en communication à destination des artisans de l’Ouest ». En 2016, il est désigné pour mettre sur pied les trente-huit meetings du candidat à la présidentielle Emmanuel Macron. « Comme nous avions créé ce mouvement de jeunesse pour porter la candidature d’Emmanuel Macron l’année précédente, nous nous sommes naturellement retrouvés à différents postes de responsabilité dans la campagne présidentielle ».

Le jeune citoyen a depuis longtemps un sens profond des institutions. Ainsi, une fois son candidat élu, il va approcher au plus près la Gouvernance d’un État. « Se voir installé à 23 ans dans un bureau au cœur du palais présidentiel, c’est assez vertigineux. La charge et le rythme de travail deviennent très rapidement intenses. Pas le temps d’écarquiller les yeux, pas de place pour les états d’âme ». Le décorum l’oblige, plus qu’il ne l’éblouit. « Je suis au service du Président de la République et de mon Pays ; c’est ma mission en tant qu’attaché de presse ». C’est le grand bain médiatique. « Ma parole engage la Présidence face à des journalistes politiques affûtés, parfois piégeux. C’est parfois en se trompant -le moins possible- qu’on apprend à ne pas reproduire ses erreurs ». Un exercice délicat, qui ne souffre pas l’imprécision. L’intensité de la charge de travail n’est pas pour lui déplaire. « Je suis devenu chef de cabinet adjoint de l’Élysée pendant deux ans, puis pendant six mois, je deviens chef de cabinet du garde des Sceaux ».

Le plus dur dans cette aventure, reste de garder les pieds sur terre. « Pour cela, je reviens le plus souvent possible à la maison, en Vendée. A Paris, je m’efforce de vivre une vie ‘normale’ : un appartement en coloc, un scooter… Les Institutions sont très bien construites pour couper les gens de la réalité ; j’ai toujours veillé à éviter ce piège ». L’effervescence du Palais ne lui donne pas le tournis. « Quand j’ai pris mes fonctions à l’Élysée, j’ai informé mes parents que j’y allais pour deux ans. C’était pour moi une parenthèse qui pouvait se fermer de deux façons : subie ou maitrisée. La première peut intervenir sans prévenir ; j’ai préféré la maîtrise de mon avenir ». Le monde politique, les cabinets ministériels n’ont pas la réputation d’être inconfortables. « C’est le risque ! J’ai fait le choix de ne pas m’y installer. Un jour ou l’autre tout s’arrête ».

Une expérience aussi profitable qu’exigeante. « J’en tire de bonnes connaissances sur le fonctionnement de l’État. C’est particulièrement utile pour acquérir ce qu’on appelle les soft skills (compétences comportementales) autour de la gestion de la presse, la coordination des équipes, l’adaptation permanente, et la rigueur au quotidien ». Le Chef de l’État impulse un gros rythme de travail.

Revenu dans le giron privé, Jean exerce à son tour un regard affûté sur la vie politique française. « Au lendemain des Législatives, la déconnexion entre la représentation et les français est flagrante ; la fracture avec Paris n’a jamais été aussi vive. Le spectacle qui nous est donné ces derniers jours est désolant. On continue de creuser l’abstention ». Lui qui n’a pas trente ans s’attarde sur la jeunesse. « Notre système éducatif n’éveille pas suffisamment la conscience publique sur la Gouvernance. Et puis il faut bien admettre que le jeu malsain entre médias et politiques repousse jeunes et moins jeunes ». Il pointe certaines contradictions. « D’un côté, on fait croire que l’on écoute, et de l’autre, les Français constatent qu’il faut six mois pour changer un passeport. Le fonctionnement de l’État, par certains aspects, est à bout de souffle ». Si le diagnostic est posé, il faut alors y remédier ? « Les problèmes sont bien identifiés, mais à force de discussions et de compromis, ils sont totalement dévitalisés. C’est un mal français. On détricote des Lois pour les retricoter. L’urgence est ailleurs : il faut investir dans l’avenir ».

Les déséquilibres territoriaux l’interrogent. « Il y a des régions où la solitude est plus prégnante, où les fins de mois sont plus difficiles à boucler. La centralisation excessive dévitalise bourgs et villages avec moins de services, des entreprises qui ne trouvent pas de repreneurs ». La transition énergétique est aussi un enjeu. « On ne peut pas culpabiliser les particuliers qui font déjà beaucoup, il me semble. On ne s’attaque pas suffisamment aux majors qui continuent de déverser de la pollution par leurs cheminées ou leurs égouts. Je ne suis pas spécialiste, mais je pense que ce n’est même plus au niveau des individus qu’il faut agir mais des groupements et au niveau international ».

Jean revient sur le système éducatif. « La différence de niveau entre l’école privée hors contrat et l’école de la République pose question ». L’immédiateté à tous les étages n’est pas l’alliée du discernement. « Le tout numérique a ses limites. Trouver une femme de ménage par une application, c’est troublant. Tout ça manque de saveur, il n’y plus aucun goût de l’effort. Notre manque collectif de modération vis-à-vis du progrès sera de plus en plus une limite à notre stabilité dans le quotidien ».

Une analyse qui confirme qu’en étant hors du circuit politique depuis deux ans, Jean s’y intéresse toujours. « Je ne sais pas si je retournerai en politique. Je considère être trop jeune pour être élu. Dans une circonscription comme la nôtre (la quatrième), il faut être en mesure de discuter avec André Liébot, Yves Gonnord, Nicolas de Villiers, des gens à l’expertise aiguisée. Je n’ai pas ce niveau d’expertise ».

Le bocage vendéen est sa respiration. « J’y retrouve ma famille, mes amis, le Puy-du-Fou où j’ai toujours plaisir à participer ». Son deuxième poumon, c’est la montagne. « Je vais à la Plagne, hiver comme été, faire du ski et du vélo de descente. Là-bas comme ici, il y a des bons gars, des enracinés qui font et qui n’attendent pas que ça vienne ». Une posture qui parle à l’entrepreneur. « La vie des entreprises est palpitante. Penser à l’avenir, améliorer la vie des gens, créer de l’emploi, c’est gratifiant ». Quand il a besoin de conseils, ses relais vendéens sont toujours à portée de ligne. « Laurent Albert est une personne d’une qualité rare, toujours à l’écoute et de bons conseil ». Le Puy-du-Fou demeure une référence capitale à ses yeux. « Philippe de Villiers a permis à toute une génération de vivre des choses incroyables. Les politiques qui ont une telle conscience du développement, au profit des gens de leur territoire, ne sont pas si nombreux ».

Pas surprenant alors qu’en guise de conclusion, Jean cite Charette : « Rien ne se perd jamais ». « De toutes mes expériences, y compris celles qui ont moins bien fonctionné, j’ai toujours su tirer quelque chose. Le problème n’est pas l’échec mais de rater une opportunité. »