Il fait partie de ces personnes dont l’humilité est à la hauteur de leur générosité. Chef d’entreprise, co-fondateur d’une entreprise d’insertion, il œuvre dans différentes associations, en particulier « Cœur du Monde » qui voit aujourd’hui 2000 enfants parrainés au Sénégal, à Madagascar, à Haïti. Face à la détresse, Patrick répond par l’action, une ‘goutte d’eau’ comme il dit.

Originaire de Remouillé en Loire-Atlantique, le travail l’amènera à Clisson dans une entreprise de menuiserie, et c’est tout près, à la Bernardière, qu’il choisira de s’établir. Dans une période prospère, le jeune apprenti deviendra cadre de production, mais au bout de quinze ans, il a envie de goûter à l’entrepreneuriat. « J’ai repris un bleu de travail en débutant avec un ouvrier et un apprenti à faire des extensions de maison, des vérandas. Piloter son entreprise, prendre les décisions, c’est plaisant ».

Voici cinq ans qu’il a cédé son entreprise basée à Treize-Septiers. « Un coup de fil un peu hasardeux, puis tout s’est fait très rapidement ». Tout juste le temps de se retourner sur son parcours. « J’ai beaucoup appris sur le tas, autour de la relation clients. Ils étaient nos meilleurs ambassadeurs. Nos portes ouvertes remportaient un gros succès à chaque fois ». Quelques incidents de parcours ? « Un incendie qui nous a obligés à installer ces chapiteaux de fortune dans lesquels nous avons travaillé durant six mois. Tant que ça restait matériel, ce n’était pas grave. J’ai eu la chance de ne pas avoir à déplorer d’accidents de salariés ; ç’a toujours été ma crainte ». Le secret de la réussite ? « Être bien entouré ».

Pleinement investi, Patrick n’est pourtant pas focalisé sur sa boîte. Il est en pleine activité quand en 2006, il crée d’un côté une entreprise d’insertion, d’un autre une association humanitaire, là aussi bien entouré. « J’allais assez régulièrement à Dakar chez les frères de Saint Gabriel apporter un peu d’outillage et surtout des techniques de fabrication en menuiserie ». À l’occasion de ses voyages, il prend la mesure d’une certaine détresse. « J’ai partagé ce constat avec certains de mes amis et nous avons décidé de lancer une association. De 30 personnes lors d’une première réunion, nous approchons aujourd’hui les 500 adhérents. Nous intervenons au Sénégal, à Madagascar, à Haïti ».

Le parrainage d’enfants, pour les aider dans leur scolarisation, est l’action la plus visible. Et très régulièrement des constructions de classes. « L’étude du projet, le financement, la validation des projets en concertation, font partie de notre mission. Nous intervenons aussi pour les questions liées à la santé ou à la malnutrition. On va sur place mesurer l’évolution des projets. On ne va plus à Haïti depuis trois ans en raison de la violence qui y sévit, mais on garde le contact régulier grâce aux moyens actuels de communication. Nous travaillons avec des communautés sur place que nous connaissons et qui garantissent le bon emploi des fonds envoyés ».

Depuis qu’il est enfant, Patrick est sensible à l’injustice. « Les enfants du Biafra avec le gros ventre m’ont toujours marqué. Nos actions restent des petites gouttes d’eau, mais c’est un devoir d’agir ». La détermination est son alliée. « Quand on veut, on peut. Un projet utile, un peu de volonté ; il n’y a pas de raison que cela ne marche pas ». Agir au loin n’empêche pas d’être attentif à ce qui se passe chez soi. « C’est un état d’esprit qui doit s’appliquer aussi à notre porte ».

L’attention à l’autre, le même réflexe qui prévaut lorsqu’avec Michel Leboeuf, il lance cette même année 2006 le chantier d’insertion autour de la menuiserie puis du maraîchage bio. « L’entreprise compte aujourd’hui quatorze salariés et trois encadrants. La structure est portée par le CCAS de Treize-Septiers. Le retour à l’emploi est de 70%, avec une présence qui ne dépasse guère un an pour les moins de 26 ans. Nos encadrants font un super travail ».

Donner son temps le rend heureux. « Les réunions ? ce n’est jamais pénible d’être avec les autres, au contraire ». Un engagement au singulier ou au pluriel ? « Mon épouse consacre beaucoup de temps à la comptabilité, à l’administratif, comme lorsque nous travaillions. Et puis l’association peut compter sur ses quatorze membres : chacun a sa mission ».

Le récent conflit ukrainien ou la pandémie montrent à quel point Patrick est en froid avec l’inaction. « Dès le début du Covid, nous avons fabriqué des masques pour les entreprises. Quand j’ai vu la guerre en Ukraine, j’ai réuni une vingtaine de personnes en leur disant : on fait quoi ? On a rassemblé des dons, quelques milliers d’euros, organisé une collecte, une vingtaine de cartons de première nécessité, fait un concert à Yprésis à Saint Hilaire qui a rassemblé plus de cinq cents personnes. A chaque fois des gouttes d’eau… mais je me dis qu’en pareille situation, nous serions si heureux de la recevoir cette goutte d’eau ».

Son analyse vis-à-vis du réchauffement est similaire. « Nos efforts sont largement insuffisants, il faut les faire quand même. Souvent on parle du réchauffement comme d’une menace future. Non, c’est déjà là ! ». Pleinement investi dans l’associatif, il ne s’est jamais engagé politiquement. « Je redoute une chose : les extrêmes dont la parole atteint les plus fragiles. Ce sont ces derniers qu’il faut aider. Ce n’est pas de la politique ; c’est du bon sens ». À ceux qui brandissent les problèmes liés à la surpopulation, il rétorque deux objections. « Limitons d’abord notre surconsommation. On ne peut pas pointer du doigt des enfants qui se contentent d’un bol de riz ; eux polluent moins que nous. L’éducation est l’autre rempart. A Madagascar, on crée des écoles secondaires qui permettent aux jeunes filles non seulement d’apprendre, mais aussi de retarder leur entrée dans la vie adulte ».

La liste de ses engagements ne s’arrête pas là : une association « Mains ouvertes » autour de projets positifs, comme ce spectacle monté avec Jacques Raveleau-Duparc : Jésus de Nazareth. « Il était prévu de le produire à Madagascar car le père Pedro l’avait vu à Treize-Septiers. Le Covid en a décidé autrement ». La vie paroissiale répond à ses convictions. « Je m’occupe des sépultures. La disparition de l’être cher est un moment comme aucun autre dans la vie d’une famille. Moi, je suis convaincu qu’il y a quelque chose après ; libre à chacun d’y croire ou pas ». À cette vie d’engagements qui pourrait lui valoir quelques louanges méritées, il rétorque cette réflexion du père Pedro : « Ce qui reste à faire est plus important que ce qu’on a déjà fait ».

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