Guillaume avait deux rêves : animer des émissions et créer sa propre radio. Après avoir accompli l’un et l’autre, il jette un petit coup d’œil dans le rétro pour retracer son parcours. Ce fondu de radio trace sa route, entouré de bonnes ondes. Il vient d’ouvrir une antenne à Fontenay, ville dont il est originaire, et il projette transférer ses studios de St Georges à Montaigu.
Lorsqu’il se baladait dans les rues de Fontenay, il n’hésitait pas à faire le détour pour passer devant les studios des radios avoisinantes. « La diffusion à travers les ondes m’a toujours fasciné. Les voix radiophoniques m’intriguent ». Dernier d’une famille de cinq enfants, il est seul à développer cette passion. « J’ai un aïeul qui a dirigé radio Dakar et un oncle qui était à l’origine de radio Pictons ; peut-être un héritage inconscient ? ». Guillaume avait équipé sa vaste chambre d’ado d’un studio. « Mes cadeaux étaient tout trouvés pour mes parents : une console, un micro… J’avais bricolé un émetteur ; les voisins du quartier m’écoutaient ». Il lui manque cependant quelques notions… « J’ai déclenché le feu dans ma chambre ; la vieille moquette n’a pas aimé ; les plombs de la maison ont sauté ».
De quoi affoler ses parents. « Ma mère a voulu que je suive une formation d’électricité. J’ai fait un CAP BEP électro technique à Rabelais, puis un Bac pro à Rouen car je m’étais épris d’une fille de Normandie ». Il décroche une formation auprès d’un ingénieur son qui avait son studio sur Rouen. « Il était guitariste et il avait accompagné Michael Jones ou Jacques Higelin. Il a voulu m’embaucher, mais j’étais plus attiré par la radio. Il me présente à l’un de ses amis, Vincent Bacle, une voix incroyable ». Guillaume fait ses armes en tant que bénévole technicien. « Je trouvais le studio magique ». Jusqu’au jour où l’animateur en place fait ses valises. « J’ai été embauché pour le remplacer. J’avais 23 ans. J’ai appelé mes parents, et j’ai pensé à mes profs qui me mettaient en garde sur ce métier ». Un de ses deux rêves se concrétisait.
Le mal du pays le gagne. « Je suis revenu en Vendée et j’ai d’abord travaillé pour le studio de PYM Production à Venansault, méconnu localement, beaucoup plus par les belles radios françaises. Je faisais des voix off pour des jingles, des pubs… ». Guillaume s’attarde un jour sur une annonce de RCF Vendée. « Hervé le Roch m’a formé durant une semaine. C’est un peu mon mentor ; tout comme Vincent à Rouen. Ces deux-là m’ont fait confiance ». Quelques mois plus tard, il se retrouve aux commandes de la matinale, avec Fanny Brevet aux infos. « Elle est devenue ma compagne. Nous sommes arrivés en 2008 ». Une radio concurrente cesse sa matinale sur la Roche. « Ça a boosté notre audience assez incroyable, jusqu’à 70 000 auditeurs semaine. J’y suis resté 5 ans au total ». Un petit détour pour diriger l’équipement culturel ‘la Longère de Beaupuy’ à Mouilleron le Captif. Puis retour à RCF, sur Angers cette fois-ci. Les temps de route, 1h30 par trajet, abrègent ses journées. « Ça a précipité mon projet de toujours : créer ma radio ! ».
Dans son esprit, différents éléments se conjuguent. « Les compétences amassées au fil de mes expériences, l’explosion du podcast, le besoin de proximité. Et puis le décès de mon père, mon premier auditeur, parti trop tôt à 68 ans. J’ai pris la mesure du temps qui passe. Je ne voulais plus attendre ». En 2016, Guillaume passe de l’idée au projet, tout en bossant chez un prestataire son. C’est en septembre 2017 qu’il installe sa radio sur la mezzanine de sa maison, avec du matériel récupéré ici et là. DIG s’est rapidement imposé comme nom : 3 lettres, le G de Guillaume, DIG comme digital, et un clin d’œil à la digue de Montaigu. « To dig veut dire ‘creuser’ en anglais, une belle image pour un journaliste ».
Il crée son association, recherche des partenaires, commence ses premiers reportages. La mairie de St Georges met un local à sa disposition. « Durant la période de lancement, environ 6 mois, je travaillais de nuit à faire les pizzas ». Quelques heures de sommeil et aussitôt le biberon donné à sa fille, il établit la programmation de la journée. « Six mois plus tard, j’étais prêt ; je pouvais me consacrer entièrement à la radio ».
Par son entremise, les bénévoles s’approprient cet outil qui les fait rêver. « Ils sont une soixantaine aux manettes. Je suis le seul salarié accompagné de deux services civiques, et je reçois de nombreux stagiaires ». Vincent Bernard, bénévole de la première heure, chef d’entreprise (Pulsion Design) lance ‘Terre d’entrepreneurs’. « Une initiative que j’ai dupliquée dans plusieurs domaines. La première année, il y avait cinq émissions et aujourd’hui nous arrivons à vingt ». Guillaume se réserve les chroniques sponsorisées. « J’ai gardé mon émission ‘All Access’ avec des artistes émergents ».
Sa ligne éditoriale c’est l’info locale en mode positif. « Les autres radios font très bien ce qui est anxiogène ». L’autre levier c’est le podcast. « C’est l’équivalent du replay à la télévision, un mode de consommation à la carte. C’est comme la musique, aujourd’hui les jeunes vont la chercher sur les plates-formes de streaming. L’arrivée de la 5G va encore amplifier ces nouveaux comportements. Les coûts et les contraintes sont moins importants que sur la FM. On peut nous écouter de partout, y compris à l’étranger ». Son bassin d’écoute est localisé autour de Montaigu et du haut Bocage. « Nous sommes suivis par 25000 auditeurs chaque semaine avec certaines émissions qui font des pointes à 7 ou 8000. Le DAB, la radio numérique offrira demain une nouvelle réception; la technologie continue de se développer ».
Son modèle économique s’appuie sur plusieurs piliers. « Le club des partenaires compte une trentaine d’entreprises. J’interviens auprès d’eux pour les former à la prise de paroles, faire des podcasts utilisés au sein de leur boîte ou à l’extérieur, pour recruter notamment ». Guillaume propose aussi des ateliers radios dans les écoles. « Notre caravane studio est présente sur certains événements. On fait également des animations sur les campings ». Il y a enfin les émissions sponsorisées. L’équilibre financier est assuré sans subventions publiques. « Cela permet de rester neutre et indépendant. Il y a peu, la représentante du CSA m’a reçu avec quelques a priori ; je lui ai démontré le contraire ». Une nouvelle antenne vient d’ouvrir à Fontenay le Comte. « Le modèle est le même avec un responsable d’antenne sur place ».
Le confinement ne l’a pas perturbé. « On était avec Fanny et notre fille à faire de la radio à la maison ; des moments dont on se souviendra toujours ». Dans un contexte morose, lui met en évidence les témoignages qui font du bien. « C’est le moment ou jamais d’accorder une place de choix aux parcours inspirants ou solidaires. Il y a plein de belles choses autour de nous ».
Chez les Benoit, la radio se vit en famille. « Fanny, étant journaliste, comprend mon métier. Elle me guide ; c’est précieux ! Surtout que pour moi, la radio coule dans mes veines ; j’en sors difficilement ; même en congés, j’ai encore un peu la tête à ça ». Guillaume s’efforce de réserver du temps pour les siens. « La perte de mon père m’a rappelé cette nécessité : on ne profite pas assez de ses proches. Il m’aide toujours là où il est ». S’imagine-t-il sans radio ? « Difficilement ! Je ne fais pas ça pour me mettre en avant. Je suis même quelqu’un de plutôt réservé. J’adore partager les histoires, découvrir des parcours. Recevoir tous les jours des gens positifs, ça n’a pas de prix ».
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