C’est dans un tiers-lieu que je rencontre Guylaine, au Ludylab à Chambretaud plus précisément. Femme engagée, militante et libérale, elle ne cache pas ses valeurs et convictions. Directrice régionale d’une agence d’intérim d’insertion, elle considère que la performance se construit aussi sur les différences. « Il n’y a rien de pire que l’entre-soi. Ma grand-mère était contremaitresse dans la chaussure et déléguée syndicale. Son regard m’a beaucoup apporté »

Celle qu’elle appelle sa grand-mère est en réalité la sœur de sa grand-mère. Guylaine passait beaucoup de temps avec cette grand-tante célibataire, dynamique. « Dans son entreprise, elle devait assurer les cadences et satisfaire les commandes. Engagée dans le climat social, elle défendait les semaines de congés et les conditions de travail. Un jour, on lui a rapporté que j’avais participé à une table ronde avec Laurence Parisot responsable nationale du MEDEF. Elle m’a appelée ; il y a eu un long silence ; puis elle m’a dit : « je suis fière de toi ». Guylaine avait un peu de pudeur vis-à-vis de sa grand-mère qu’elle respectait à évoquer son militantisme au sein du mouvement des chefs d’entreprise, d’autant qu’elle est dirigeante salariée. « Finalement, on partageait des combats similaires avec des casquettes différentes. Le militantisme pour ma grand-mère n’avait pas deux visages. C’est la recherche du bien commun qui prévalait. Son ouverture m’a beaucoup apporté ».

Ce sont des patrons vendéens qui ont encouragé Guylaine à rejoindre le MEDEF. Originaire de Saint Martin des Tilleuls avec une bonne partie de sa famille établie sur les Herbiers, elle sait décrire ce que représente l’engagement collectif, au sein des associations comme des entreprises. « Ça donne de belles couleurs de savoir d’où on vient, de connaître ses racines. Le terreau familial est aussi très important. Quand des valeurs aussi solides sont bien établies, on peut construire, créer. Je constate hélas à travers mon métier les dégâts que ça peut occasionner quand ces fondations sont fragilisées ».

« Dans une agence d’intérim d’insertion on a une obligation de résultat avec des moyens différents de ceux de l’intérim classique. On accompagne des personnes très peu diplômées, avec une expérience faible. On ne fidélise pas les intérimaires ; on essaie de les mettre aussi rapidement que possible sur le tremplin du travail en les formant, en les accompagnant. A l’issue de leur parcours, il faut aller chercher la main tendue, et dans notre région les mains tendues sont nombreuses. J’ai de multiples exemples de réussites ; Celui qui me vient à l’esprit est celui de quelqu’un qui sortait du milieu carcéral, et qui aujourd’hui est responsable d’une équipe de 50 personnes. A son tour, il fait appel à nos services ». L’insertion est pour Guylaine un engagement viscéral. « La seule arithmétique du taux de chômage n’est pas suffisante. Il faut que les gens soient bien sur leur poste, épanouis. Qu’ils ne soient pas détruits par l’emploi mais au contraire bien dans leurs baskets. Il faut changer de prisme : nous ne sommes pas des pourvoyeurs de bras ».

Guylaine est sportive. « J’ai pratiqué le volley et la nation en enduro -ma meilleure performance dépasse les sept heures d’affilée – mais aussi tennis et tennis de table, sans oublier l’alpinisme touristique avec mes parents ». Elle fait le parallèle avec le monde de l’entreprise. « Le dépassement de soi, le collectif, la stratégie, le respect des règles communes… ». Forger le mental, c’est aussi cela qui lui a permis de surmonter un AVC qui s’est invité il y a quelques mois. « On a beau voir tous les médecins ou neurochirurgiens, c’est le mental qui reste la meilleure thérapie ».

Elle déplore que le milieu des dirigeants soit parfois dénigré. « Avec le télétravail, on a dressé inutilement les cols bleus contre les cols blancs. Le monde de l’entreprise sait s’adapter, y compris pour les 28 jours du congé parental. Il faut juste qu’on ait les moyens de s’organiser pour ne pas déstabiliser les équipes ». Représentante nationale RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) dans son groupe, elle défend sa vision. « Pour bien poser le social, le sociétal et l’environnemental, il faut que le socle économique soit solide et viable. On ne peut pas procéder à l’inverse ».

Elle est confiante pour ses enfants. « Ils sauront s’adapter. Ils peuvent voyager plus facilement que nous pour revenir avec de belles expériences ». En guise de conclusion, elle repense à sa grand-mère. « J’aurais aimé avoir son regard sur la pandémie, elle qui a connu la peste, le choléra, les deux guerres et les tickets de rationnement ».