C’est une boule d’énergie. Pétillante, déterminée, Sylvana ne tient pas en place. Elle se donne à fond pour son entourage et son travail. Cela ne suffit pas. Cette maman de quatre enfants est passionnée par la course à pied. Avec une de ses amies, elle s’élancera en novembre prochain sur le Raid Amazones au Cambodge. Un défi de plus, qu’elle veut solidaire, au profit de Proxiligue.
Elle est née à Brazzaville au Congo. « J’avais quatre ans quand ma maman est morte. Mon papa avait l’âge d’être mon grand-père. Il a souhaité que je vienne en France pour recevoir une éducation ». Elle conserve quelques images à l’esprit de son enfance congolaise. « Aujourd’hui, je me considère comme une fille d’ici, en France, qui n’oublie pas ses racines. Je le répète souvent à mes enfants ».
Pendant son internat à Caen, Sylvana fera un stage en maladies infectieuses, l’objet même de sa thèse. « Mon chef de service voulait faire une étude sur l’entrée de la grippe dans un hôpital. Les patients qui venaient aux urgences étaient dépistés pour ensuite permettre aux soignants de prendre les précautions nécessaires, et aux cliniciens d’anticiper les décompensations liées au virus. En lien avec le laboratoire de virologie, ça nous permettait aussi de définir une politique de prévention ». Ce stage l’a menée à s’orienter vers l’Hygiène Hospitalière. « À l’hôpital, la transmission de bactéries et autres germes peut se faire de multiples façons, de personne à personne, ou par le matériel médical. Ce sont les maladies associées aux soins (anciennement appelées « nosocomiales »), qu’il faut éviter à tout prix. L’hygiène hospitalière, c’est la prévention (surtout) et la lutte contre ces infections acquises dans un établissement de santé. Je surveille tout particulièrement les infections post-opératoires en orthopédie ».
Nous sommes 13 dans le service, bientôt 14, car l’ARS nous demande d’intervenir dans les EHPAD et les maisons/foyers d’accueil spécialisés pour prévenir le risque infectieux par des formations en hygiène hospitalière ». Ce domaine lui plaît beaucoup en raison de la variété des champs explorés : ses journées sont imprévisibles, ce qu’elle apprécie. « On est sur tous les fronts, de la restauration au bloc opératoire. J’aime tout ce qui touche à la microbiologie ».
Sa véritable passion, c’est la course à pied. « Petite, dès l’âge de six ans, je courais très vite. J’ai commencé par le sprint ; à l’époque je détestais les distances longues, même un 800 mètres. Je préférais l’explosivité ». Son approche change à l’issue de sa première grossesse. « J’avais 24 ans et j’avais pris 30 kilos. Je n’avais pas le choix, il fallait que je reprenne par des distances plus longues. Avec la perte de poids, j’allais de plus en plus vite ». Son ambition est de progresser, sans viser la compétition. Son programme d’entraînement est régulier, deux fois en semaine, une fois le weekend.
Sylvana a 28 ans lorsqu’elle arrive en Vendée. Une copine l’inscrira aux foulées du Gois. « C’était un très bon moment ». Ce virus-là est plutôt sympathique. « Sur un malentendu, je me retrouve sur un 20 kilomètres à Tours, pas suffisamment préparée ; il pleuvait… ». Elle se promet de ne plus vouloir souffrir comme ça. « J’ai préparé sérieusement le semi-marathon des Sables d’Olonne. Ça m’a redonné un élan ». Il lui reste neuf semaines pour s’aligner sur le marathon de la Rochelle. « C’est un peu court ; je le boucle en 3h59 ». Une épreuve mythique. « Les 30 premiers kilomètres se passent dans les jambes ; les dix suivants dans la tête. Les deux derniers c’est avec le cœur ». Une énorme satisfaction qui lui change la vie. « C’est un mélange de liberté, d’évasion et d’écoute de soi. Ça procure une confiance très forte. Cela change mon rapport au travail, que j’essaie de rendre plus fun ».
« Je m’adaptais aux autres ; désormais, j’ai envie de penser un petit peu plus à moi. Même si j’ai quatre enfants, malgré les amplitudes horaires de mon travail, j’ai voulu faire du triathlon ». Le Raid Amazones, multisport, est son prochain objectif à l’automne prochain. « J’ai lu beaucoup de témoignages indiquant que ce raid, s’il est réussi, procure une confiance incroyable. Il y a du VTT, du canoë et du trail. J’y vais avec une amie qui elle est psychologue. J’ai très envie qu’on aille au bout, toutes les deux ». Trois cents amazones sont attendues dans les Temples d’Angkor. « L’objectif de cette course est aussi de valoriser les femmes qui cherchent à s’affirmer. C’est parfois bien de redire qu’il reste encore un peu de chemin vers l’égalité homme femme ».
Leur démarche n’est pas égocentrée. « L’inscription, le déplacement, l’équipement… un budget de 11200€ au total. Nous sollicitions actuellement les entreprises pour le sponsoring ou le mécénat. Le surplus ira au projet Proxiligue, le prolongement des prestations proposées par la Ligue contre le cancer aux malades isolés, dans l’incapacité de se déplacer au plus profond des campagnes comme en ville, afin qu’ils puissent bénéficier des mêmes services en terme de soins de support : activité physique adaptée, accompagnement diététique, soutien psychologique et soins de socio-esthétique ».
Sylvana a tracé son chemin à la force de son tempérament, joyeux et déterminé. « J’ai dû m’affirmer avec ma couleur de peau, mon petit écart de dents… La diversité est la richesse de ce monde. Chacun apporte, avec sa personne ». Une philosophie avec laquelle elle encourage ses enfants. « Je viens d’un pays pauvre ; je n’ai pas le droit d’oublier. J’aide mes enfants à prendre conscience qu’ici on est bien lotis. Je souhaite qu’ils s’affirment avec leur propre personnalité : s’ils veulent s’habiller contre les codes du collège, qu’ils le fassent. Je les pousse à vivre avec leurs passions, leurs envies ».
En tant qu’hygiéniste, Sylvana a vécu la pandémie « au cœur du réacteur » comme elle dit. « J’ai remarqué deux versants bien distincts. Celui de la solidarité envers les personnes âgées, avec une belle mobilisation des plus jeunes. A contrario, le Covid a désorganisé les équipes soignantes à l’intérieur du système hospitalier. C’est compréhensible au vu de la peur qu’a suscitée le virus ; certains soignants étaient déstabilisés, il a fallu encourager, rassurer pour préserver l’essentiel : soigner les gens. A chaque nouvelle vague, il fallait recommencer ».
Si le sport résume l’état d’esprit de cette battante, son inspiration provient entre autres de M. Nelson Mandela. « Je pense souvent à cet homme, à la phrase du poème Invictus : ‘Je suis le maître de mon destin, je suis le capitaine de mon âme’. A mon niveau je suis une personne très positive, qui transforme les problèmes en défis. Je mets de côté l’urgent ou l’important qui m’empêche de me concentrer sur l’essentiel ». L‘analogie avec le sport lui semble une évidence. « Courir c’est la liberté. Tu traces ton parcours, comme dans la vie tu crées ton chemin. J’ai été beaucoup aidée par mes proches, mais je ne suis pas née avec une cuillère en argent dans la bouche. Mon chemin, je l’ai fait pas après pas ».
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