Ambassadeur des jardins au naturel, Marc s’émerveille de son potager au mois de mai, réussi sans la moindre intervention mécanique. Des découvertes qui sont d’abord le fruit de ses expériences personnelles. Un pépin de santé ne fera que confirmer les bienfaits de ce qui devient sa grande passion. Comme la photo qu’il pratique depuis l’âge de 20 ans.

Bien qu’il soit natif de Saint Maurice-le-Girard, c’est au Breuil-Barret que Marc a vécu sa jeunesse. « J’ai été dans la ferme de mes parents jusqu’à 23 ans. L’exploitation était trop petite alors j’ai repris des études, puis j’ai enseigné : 4 ans à la Maison Familiale de Clisson, 5 ans à L’Institut Rural des Herbiers. » Le plaisir de transmettre s’accompagne chez lui du bonheur de s’ouvrir sur le monde. « Un éveil qui provient des mouvements de jeunesse (MRJC) qui me sortaient de mon village. Mon goût de l’ouverture et de l’engagement vient de là. » Professionnellement, cela se traduira par un nouveau challenge. « J’ai pris la responsabilité commerciale d’une entreprise de machines agricoles, spécialisée dans le travail de la terre et le semis. C’était pour moi un virage à 90° et une belle ouverture : les salons à l’export, les nombreux contacts. Je supervisais la région Ouest, me déplaçais quelques fois à l’étranger, en Espagne principalement. Je faisais aussi des formations en interne, retrouvant mon métier précédent. » Une vie trépidante qu’il savourera jusqu’à l’âge de 60 ans où il prend sa retraite.

La photo l’anime depuis qu’il a 20 ans. « J’ai toujours aimé ramener des souvenirs, et très tôt, j’étais en recherche d’une image correcte. » Il découvre les joies du labo, le plaisir de l’image qui se révèle. Une passion qu’il partage avec ses élèves lors des permanences du soir. « Ne venaient que les plus motivés. Le mystère de la chambre noire intriguait. » Engagé au sein de Familles Rurales, il sera également à l’origine du club photos sur la commune de Vendrennes. « J’avais ce savoir-faire du labo que j’aimais partager. La mairie nous a mis un local à disposition au sein du foyer rural. Nous avons compté jusqu’à 35 adhérents avec une exposition tous les deux ans. » Le numérique supplantera l’argentique dans les années 2000. « C’était la révolution. »

Depuis l’Instamatic de l’époque à l’hybride d’aujourd’hui, il a suivi l’évolution technologique. « Je faisais aussi les photos de matériel à l’entreprise. » Beaucoup de choses l’émerveillent. « J’ai une sensibilité pour la montagne ; tout ce qui touche à la nature d’une façon générale, les animaux domestiques ou sauvages comme les marmottes ou les isards. Quand je suis en milieu naturel, je me sens en symbiose avec les éléments, peut-être en raison de mon passé à la ferme ? »

La ferme où il a appris à jardiner aux côtés de son père. « Il avait une réputation de très bon jardinier. Il ne faisait d’ailleurs confiance qu’à lui-même. Il me faisait retourner la terre à la bêche. » Une technique que Marc laissera pourtant tomber plus tard. « Je n’utilisais que la fraise du motoculteur pour travailler en surface. Mon père m’a dit : tu n’auras jamais de bons résultats comme ça ». Quelle n’a pas été sa surprise! « Nos habitudes sont parfois nos ennemies. S’il voyait comment je cultive mon jardin aujourd’hui ! » Plus de matériel mécanique : une grelinette pour aérer le sol, un croc pour gratter et le râteau pour fignoler. « Je n’ai même plus besoin de la fourche pour arracher les légumes ; ça vient tout seul. » Les piliers du concept de la permaculture sont réunis. « Les plates-bandes font 1,25 mètre pour que le milieu puisse être joint à bout de bras, sans que jamais on ne monte sur la terre. Il ne faut jamais la tasser. J’utilise le paillage pour atténuer la battance des fortes pluies. Cela retarde l’évaporation, limite les arrosages. L’herbe se développe moins vite et la vie du sol en est favorisée. »

Marc découvre les bienfaits de ce mode de culture par ses propres expériences. « Depuis longtemps, j’utilisais des feuilles mortes pour protéger mes dahlias. La terre jaune à l’origine devenait brune, plus fertile et plus facile à travailler. Je me suis dit : si je pouvais faire tout le potager comme ça, ce serait formidable. » Un accident cardiaque sérieux l’encouragera à poursuivre cette voie. « Un enfant de 10 ans pourrait faire mon potager. J’ai d’ailleurs un de mes petits-enfants qui me donne le coup de main quelquefois. » L’ancien formateur est toujours pédagogue. « Les micro-organismes qui sont bien en surface disparaissent quand on retourne la terre. Il ne faut pas perturber la vie du sol. »

Marc aime partager ses expériences. « Avec la Maison de la vie rurale, j’ai participé à une opération ‘jardin ouvert’. Plus de 150 personnes sont venues. Mon jardin est toujours ouvert pour celles ou ceux qui ont envie de découvrir. Cela fait sept ans que je cultive comme ça. Les résultats sont incontestables. Le légume maison, c’est irremplaçable. » Un constat qu’il n’extrapole pas pour autant à l’agriculture. « Ce qui est faisable sur un potager ne l’est pas forcément sur une très grande surface. Mais le recours à la charrue n’est plus systématique. Cela traduit une prise de conscience. »

En creusant un peu, Marc déplore le manque de bon sens et les ravages de la société de consommation. « La sagesse est dans la nature. Plus on est observateur, plus on est respectueux. La connaissance et la prise de conscience aideront à bannir certains comportements. On ne peut pas reprocher aux plus jeunes de ne pas redécouvrir d’anciens réflexes ; ils ne les ont pas connus. Il y a un gros travail de sensibilisation à faire pour voir moins de sacs poubelles déposés à côté des containers ou de déchets sur les bords de routes. L’école fait ce travail, il me semble ; c’est à l’adolescence que souvent cela bascule… »

Avec son épouse, Marc est adepte du moindre déchet. « Les déchets ultimes représentent chez nous moins de 6 sacs par an. Tout ce qui est fermentescible va au compost. Comme le tas de fumier à la ferme. Et puis, il y a les poules qui font un travail de recyclage incroyable. » Il pointe la consommation comme responsable. « Tout est jetable. L’homme est devenu idiot. » Il se souvient du gasoil à très bas prix, plus pratique que le bois à faire chaque hiver. « Le bois était une énergie inépuisable qui se renouvelait tous les dix ans. On a délaissé les arbres et les haies. Le remembrement a donné le coup fatal. On arrache les buissons pour faciliter le passage de la moissonneuse. Bonjour le vent, adieu les oiseaux. C’est tout l’écosystème qui est menacé. »

Marc réfute le terme ‘écologie’. « Je n’ai signé chez personne. C’est juste une question de bon sens ». Pas plus qu’il ne trouve le terme ‘biologique’ approprié. « J’ai enseigné la biologie ; j’ai du mal à faire le parallèle. Je préfère dire simplement ‘naturel’. Je jardine au naturel. » Son message coule de source pour cet amoureux de la nature. « Si on redécouvre toutes les vertus de la nature, tout le monde s’épanouira mieux. La pédagogie sera plus efficace que les caméras ou les gendarmes. » L’émerveillement aussi.