Le gilet sans manches lui confère une allure dandy ; la chevalière exhibe sa Foi. Il fut directeur des programmes avant de prendre les manettes de TV Vendée il y a bientôt 5 ans. Un parcours dans le monde médiatique, tendance catho. Hervé est toujours chroniqueur sur les ondes de RCF Vendée, radio qu’il a dirigée pendant 11 ans. La disparition tragique de son fils il y a 18 mois a bouleversé sa vie. Il garde confiance en l’Espérance. Rencontre avec un homme sans détours.
De ses racines, il esquisse un autoportrait. « Je suis finistéro-libanais, bien que né à Laval. J’aime la rondeur libanaise, la simplicité et l’amour des gens. Je suis aussi finistérien, sans faux-semblants, incapable de faire le billard à 3 bandes ; je suis très direct. » Un tempérament affirmé, comme le granit rose de la Presqu’Ile de Crozon, poli par les éléments. « Je me souviens des montages diapos qu’on faisait pour remémorer les camps de scouts : on associait la musique aux images et on posait la voix. » Déjà, il a le goût pour la transmission.
L’envie de devenir journaliste surviendra plus tard. « J’ai essayé une école militaire que j’ai abandonnée ; même sort pour la FAC. C’est pendant mon IUT de gestion que j’ai eu deux expériences qui ont façonné mon envie. Je suis parti deux mois à Londres au cours desquels un journaliste de Ouest-France m’avait demandé de faire des papiers. Je me suis piqué au jeu. Puis un jour à l’IUT de St Malo, un journaliste de la Radio Force 7 nous a proposé de monter une émission étudiante. Cela a fini de me convaincre. »
Ce même journaliste l’oriente vers Sciences Com’ à Nantes. « J’ai alterné entre radio et télévision par la suite. Après mes premiers stages à RCF Vannes, j’ai rejoint une société de Production (VM Production) pour devenir assistant de production. » Hervé travaille pour l’émission scientifique ‘E=M6’ ainsi que sur le programme ‘Passé simple’ consacré à l’histoire. Un petit détour par Radio Notre-Dame où il crée l’émission ‘le bistrot de la vie’. Entre-temps, il s’est marié. « À la naissance de notre premier enfant, on a souhaité quitter la capitale. Un poste se libérait à RCF Vendée… »
Il succède au Père Morisset et devient le premier directeur laïc de RCF Vendée en 2000. « La radio a compté jusqu’à 7 salariés et une équipe qui est passée de 30 à 110 bénévoles. » Dès 2008, le cinéphile a sa chronique sur TV Vendée. « Une opportunité s’est présentée en janvier 2011 pour diriger les programmes : tous les contenus en dehors de l’info. » Il initie une grande réforme de l’antenne, avec une série d’émissions nouvelles, dont l’émission « Sans détours » qui le voit sillonner la Vendée à travers quelques figures. Au moment où il s’interroge sur la suite de sa carrière, la direction de la TV devient vacante. « Je maîtrisais la gestion des contenus, mais il me manquait la gestion d’un centre de profits avec toutes ses composantes. » Une belle occasion d’ajouter une corde à son arc. Trois ans plus tard, son fils Augustin est victime d’un accident.
« Une détresse infinie de laquelle je sortirai un jour, probablement grandi, mais c’est encore trop tôt. Il n’y a pas beaucoup de choses plus terribles que la perte d’un enfant de 18 ans. J’ai la chance d’avoir une épouse merveilleuse ; elle est mon gouvernail, mon phare. Ce drame a tonifié notre couple, et renforcé nos convictions. Je sais qu’à travers mon désespoir actuel, il y a l’Espérance ». Ses sentiments profonds nourrissent ses chroniques diffusées sur RCF et les réseaux. « Je suis en vérité avec ma Foi, loyal et fidèle envers mon Augustin. » Des éditoriaux qui laissent poindre l’espoir au milieu du désarroi. « J’ai besoin de donner un sens à tout ça, difficile à trouver face au décès de l’un des siens, si ce n’est à travers la Foi. » Il reçoit en retour des messages qui s’ajoutent aux très nombreux témoignages. « Je sais qu’il y aura une fécondité à ça. Augustin a eu une vie pleine et remplie en dépit de ses 18 ans. Ce n’est pas facile de s’abandonner dans la confiance, de s’ouvrir à la grâce de l’abandon. »
Hervé veille à ce que cette épreuve n’interfère pas dans son travail. « Je travaille beaucoup. Par loyauté envers les salariés et le Conseil Départemental qui est l’actionnaire majoritaire de la TV. C’est encore difficile de trouver le bon alignement qui procure l’énergie pour être pleinement efficace. Il faut que je retrouve de la joie dans mon quotidien. »
Sa passion de la rencontre offre au breton de toujours un regard acéré sur la Vendée, son territoire d’adoption. « Sur le plan économique, j’observe une mutation à travers la dissociation du capital et du travail. La transmission des entreprises se fait de plus en plus en direction de financiers qui ne sont plus sur les valeurs qui faisaient la réussite de beaucoup d’entre-elles. » Le vendéen est-il si différent du finistérien ? « Le vendéen ne donne pas sa confiance si facilement, et pourtant il est plus accueillant que le breton. Dans les deux cas, une fois que cette confiance est accordée, c’est du solide. J’observe et je peux juger les comportements, jamais les gens. »
L’homme de télé n’est pas tendre quand il s’agit du rapport à l’écran. « L’immédiateté, le déracinement, l’inculturation… autant de menaces amplifiées par le monde médiatique. J’aimerais former des jeunes face à cette logique. Je rêve d’un média au service de la vérité. Entre les militants et les lénifiants ou les utopistes, il y a une place pour la confrontation, sans que le jugement n’interfère. »
Il retrouve ses 16 ans lorsqu’il enfourche son solex. « J’en fais avec des copains ; c’est très agréable. » Le bateau et la plongée en apnée sont souvent au programme de ses vacances. « Je retourne très facilement chez mes beaux-parents en Bretagne ou chez mes parents dans le Finistère. » La Bretagne est toujours là quand il éprouve le besoin de se retrouver avec lui-même. « Je vis quasiment comme un ermite en louant un mobil-home dans un environnement boisé, près d’une abbaye. Je suis la messe quotidiennement et j’articule ma journée autour de la pêche. Seul. Mon bonheur, c’est le Bon Dieu et les éléments, une semaine par an. »
Aux incertitudes de ce monde, il apporte sa réponse de croyant. « Beaucoup de choses confinent au désespoir. Je crois en l’Espérance sur cette terre. On gagne tous les jours à être meilleurs, à rendre le monde meilleur. Il y a toujours du positif à trouver dans l’homme. » Il se rappelle d’un père jésuite qui lui avait donné la recette d’une bonne décision. « Tu réfléchis, tu décides, et ensuite tu te laisses aller à l’affectif. Il faut respecter cet ordre, valable pour beaucoup de décisions. » Il conclut en évoquant Charles de Foucauld, l’ermite du Sahara algérien. « Un temps éloigné, il redécouvre Jésus, travaille avec les musulmans et fait l’unité entre tous. Faire l’unité entre les gens c’est essentiel. » La prière de celui qui sera canonisé en mai prochain est chevillée au cœur d’Hervé : « Je m’abandonne à Toi, Fais de moi ce qu’il te plaira… »
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