Son regard dit les choses. Plus que deux petites heures avant que Vitaliy prenne le volant de son camion pour rejoindre la frontière ukrainienne en Pologne. Garagiste depuis 5 ans à l’Hermenault, il a aujourd’hui la double nationalité. L’actualité de son pays est venue perturber sa quiétude vendéenne en cette fin février. Sa famille et celle de son épouse résident dans le centre-ouest du pays. Lui qui a servi 9 ans dans la légion étrangère ne peut rester inactif.

Son camion est rempli de vivres, de vêtements, des médicaments et différents matériels, fruits de la solidarité villageoise. « Les gens sont incroyables ; ça me touche et ça me donne l’énergie pour agir à ma façon. Ce que je fais, ce n’est pas grand-chose. Mais pour moi c’est un devoir ». Il pense être à la frontière au petit matin, dimanche. « Je ne prends pas de risques. C’est un trajet qu’avec ma femme nous avons fait plusieurs fois ». Myroslava son épouse est restée à l’Hermenault avec leurs deux enfants.

Vitaliy vit en France depuis 2008. Il a seulement 23 ans quand il décide de quitter son pays où il était dans la police, à l’université des affaires intérieures. « Je voulais servir dans la Légion en France. J’ai d’abord rejoint le 2ème régiment étranger des parachutistes en Corse où je suis resté 7 ans. J’ai été muté dans un autre régiment pour encadrer les jeunes légionnaires. Deux ans plus tard, je demandais ma reconversion pour évoluer dans la mécanique automobile. C’est ainsi que je suis arrivé à Fontenay le Comte ». Militaire du rang, il ne voit plus son évolution au sein de l’armée. « Mon métier me prenait énormément de temps. Ce n’était plus compatible avec ma conception de la vie de famille ».

Fort de son expérience, il ouvre un garage au cœur du village en 2017. « Nous sommes vraiment bien intégrés ici ; ces derniers jours, les gens sont vraiment sympas, un sourire, un petit mot chaleureux. Sans parler de tout ce qu’ils emmènent. La mairie a apporté son soutien. Ça me fait vraiment chaud au cœur et ça me pousse à agir. Et puis j’apprécie d’être ici en ce moment pour ma femme et mes enfants. Mais nos familles sont là-bas. On ne fait qu’y penser. On s’inquiète pour eux. Nous sommes toujours en contact, le plus souvent par textos. Les échanges sont brefs, mais ils nous rassurent ».

Vitaliy est extrêmement prudent vis-à-vis de la situation. « J’ai envie d’y croire mais nous sommes face à la deuxième armée la plus forte au monde. Je suis surpris de la capacité de résistance de l’armée ukrainienne. Je suis fier pour eux, pour notre pays. Ça aussi ça me donne envie de les aider, à ma façon, en participant de façon concrète ».

Il s’affaire aux derniers préparatifs. Il fera la route avec un ukrainien venu en Espagne il y a quelques semaines. « Il a eu connaissance de mon voyage et il s’est raccroché ». Porté par ce mélange de souffrance au pays et cet élan de solidarité locale, Vitaliy espère rentrer lundi soir à l’Hermenault. « C’est grâce à tout le monde que je peux faire ça. Ça me fait chaud au cœur ; je suis touché ».