Elle a les pieds sur terre par sa formation en Droit, et la tête dans les étoiles pour la psychologie. A l’aise dans le milieu de l’entreprise où elle assurera de nombreuses formations, Mauricette aime marcher dans le sable du désert marocain. Une forme d’ascétisme qui la fait se retrouver avec elle-même. Les vertus du Sahara partagées aux personnes qu’elle entraîne dans sa méharée. Un tempérament de feu, un embrasement qui rendent le sable encore un peu plus doré pour ses convives.

Forte d’une formation de psychologue, Mauricette travaille à la Sauvegarde avant de renouer avec le milieu de l’entreprise qu’elle connait bien par son ex-mari, dirigeant. Après son divorce, son chemin de vie bifurque. « Avec mon compagnon, nous avons songé à une agence immobilière ; c’est pour ça que j’ai fait un DEUG de Droit en cours du soir sur un an ». La rigueur du Droit s’accorde plutôt bien chez elle aux sciences humaines.  « Je me suis installée comme psychothérapeute, consacrant une grande partie de mon temps à la formation en entreprise. L’organisme que j’ai monté s’appelait Psycos ». L’audace n’est pas pour lui déplaire. « J’ai fait beaucoup de coaching d’équipes de direction, d’abord dans le secteur, puis avec les mutations des cadres dirigeants, j’ai été appelée sur toute la France, dans la filière ‘bois’ notamment ».

Mauricette, une personnalité, un prénom… « J’ai souvent remarqué que les gens que je formais n’inscrivaient pas ‘formation’ sur leur agenda, mais ‘Mauricette’ ». Un prénom qui l’interpelle ; pas au point de vouloir en changer. « J’aurais voulu m’appeler Martine, Françoise…mon père s’appelait Maurice. La personnalité se forme aussi avec le prénom. Celui-ci est un peu bizarre, mais il me correspond. D’une façon générale, je ne rentre pas trop dans les cadres ».

Cela se traduit chez elle par un profond besoin d’évasion. « Nous avons fait un voyage au Maroc il y a très longtemps. La magie des riads m’a fait rêver. Nous y sommes retournés des années plus tard pour en acheter un. Nous commencions à désespérer. La veille de notre retour, au petit matin, je repère une agence sur une pub. Quand l’agent nous a fait visiter, j’ai su immédiatement en rentrant dans la rue qu’il y avait au bout ce que je cherchais. Par contre, le budget explosait ». On lui suggère d’y ouvrir une maison d’hôtes. « Je ne connaissais pas vraiment et je ne m’en occupais pas suffisamment ». Le comptable constate des rentrées trop faibles, l’invite à louer à partir de la France en commençant par son cercle rapproché. « Là, ça m’a plu. Des copains venaient pour des évènements, en famille, entre potes. Ça a bien fonctionné comme ça ; c’était génial. Pour ma part, j’y venais tous les mois me ressourcer ».

La psychothérapeute Mauricette voulait goûter aux vertus du désert. « Je suis partie une première fois, toute seule, disant à ma famille que je partais avec un groupe. Ce n’était pas le cas mais je ne voulais pas les affoler ». Elle s’attache les services de deux nomades, Mohammed et Brahim. Plus de réseaux, plus de contacts possibles à l’entrée du désert. « Il a fallu que je lâche tout. C’était ma première expérience, un désert de printemps ». Elle partage les soirées autour du thé, seule avec ses deux guides. « Des nomades qui ont toujours connu le désert. Des âmes pures. Brahim a fait sa vie avec une allemande, une maîtresse yogi venue en repérage ».

L’envie de désert devient addictive. « J’emmène mes copines et mes petits-enfants découvrir le désert, dès cinq ans, quel bonheur ! ». Elle propose l’expérience du désert dans le cadre de son activité professionnelle, elle qui est formée à l’hypnose, à l’analyse transactionnelle, la PNL…Le dépouillement du désert n’est-il pas le meilleur endroit pour se retrouver avec soi ? Pour chaque trek, elle impose à l’agence les services de Mohammed. « Un jour il m’a demandé si je pourrais l’aider à s’installer. Je lui ai dit oui, à la condition que ce soit lui qui fasse les treks. Et comme il avait des enfants et qu’il venait d’acheter une petite ferme, il n’a finalement travaillé que pour moi ».

La vie est rude dans cette région de l’Atlas. Mauricette est touchée par l’histoire des nomades. « Les Français ont fait la France, les berbères le Maroc ». Par celle de Mohamed. « Il ne savait pas compter. Sa culture de pastèques n’était pas assez rentable, alors j’ai sorti ma calculette. J’allais chez lui 2 ou 3 fois par an ; aujourd’hui il gère lui-même. Il voulait me dire merci. Je lui ai répondu : tu m’as fait découvrir le désert comme personne n’aurait pu le faire. Je suis tombée avec quelqu’un de pur, un petit génie ». Les conseils dépassent la simple gestion de son affaire. « Il n’y a que sur la contraception que je n’y arrive pas trop. Il est au cinquième enfant, et ça fait trois fois qu’il me dit que c’est le dernier ; il voulait une deuxième femme…Il n’a pas encore 40 ans ». Elle crée l’association (Loi 1901) ‘Au cœur des Dunes’.

Elle en est convaincue, le désert est le meilleur thérapeute au monde. « Après une journée de marche, les émotions remontent. Il peut y avoir des pleurs incontrôlés, ou des larmes salvatrices. Dans le désert, il n’y a aucun parasite. Il permet de reprendre la possession de soi. Chose qui est plus difficile et plus long dans une salle à la Roche sur Yon. C’est encore plus fort qu’une séance d’hypnose, un outil pourtant très puissant. Je me souviens d’une femme qui m’a parlé avec sa voix de petite fille ».

Mauricette a un regard déterminé qui révèle son tempérament de feu. « Parfois ça décape ». Elle subira une intervention pour un cancer du sein, juste avant de partir avec un groupe pour le Maroc. « Quand j’ai interrogé le chirurgien, il m’a parlé de petites cellules cancéreuses. Comme pour atténuer le diagnostic. Je suis partie seule me faire opérer. J’aime faire les choses toute seule quand c’est important ». Son mari et ses deux enfants n’ont pu s’empêcher de venir. « Qu’est-ce que vous foutez là ? ». Ce même tempérament qui ne lui fait pas peur d’affronter seule le désert. « Il fallait que j’aille au bout de quelque chose qui me faisait envie ».

Elle ne s’inquiète pas plus que ça de l’avenir. « Les jeunes sont câblés pour affronter les défis qui les attendent ». Elle appartient à cette génération en or qui n’a pas connu la guerre. « Ce qui va me gêner le plus, c’est la privation de liberté ». Voilà un an qu’elle n’a pas touché le sable. « C’est insoutenable ». Elle s’inquiète aussi des modèles autoritaires qui prospèrent dans le monde.

Elle n’est pas matérialiste, est heureuse avec tout le monde, du dirigeant au type qu’elle croise dans la rue. « Moi il faut que je donne ; ce n’est pas pour rien que je suis psychologue ». Elle pense être un accident de la vie car ses parents ne voulaient pas d’autres enfants. « Dans ma pratique, j’ai vu que beaucoup souffraient d’être un accident. Pas moi. Par contre j’avais entendu de mes parents : ‘tu es notre bâton de vieillesse’. Effectivement, je les ai accompagnés jusqu’au bout ; je ne me suis pas forcée ».

Elle a redécouvert récemment deux cadres qui ornaient jadis les murs de la salle à manger. « Deux tableaux du désert que mon père avait dû rapporter du Maroc où il avait fait son service. Je les ai eus sous les yeux pendant longtemps. C’est probablement l’explication de ce besoin de désert ? ». L’endroit où elle souhaite que ses cendres soient dispersées, le plus tard possible, par Mohammed, son fils du désert.

Riad Babuch  ( la babouche d’Aladin qui permet de voyager hors du temps)