Sa cabane au fond des marais est son repaire. Son élément c’est l’eau. L’eau de la mer qu’il fend lorsqu’il plonge. L’eau de la terre qui forme le biotope maraîchin. Jean-Baptiste fut sacré champion du monde de chasse sous-marine en 1975 au Pérou. Il jouera les premiers rôles de cette discipline au niveau mondial durant 20 ans. Durant toute sa vie il s’est émerveillé. « Je vis de la nature, pour la nature, par la nature ».

Il a 8 ans lorsque sa maman lui offre un masque de plongée. « Un coup de foudre. Je restais des heures à observer la nature aquatique, m’obligeant à garder des pull-overs pour ne pas brûler sur l’eau ». Comme il est né à Oran, la côte algérienne sera le prélude à des explorations dans le monde entier. « De la Louisiane à la Nouvelle Calédonie, du golfe du Mexique à la Polynésie ».

Jean-Baptiste a connu deux virages majeurs dans sa vie. « Le premier, c’est lorsque j’ai arrêté mon métier d’analyste programmeur en informatique pour courir le monde et exercer ma passion de la pêche. Le deuxième, c’est quand j’ai découvert le marais ici. J’habitais Marseille où j’avais ma maman, mes copains, le club… J’ai tout laissé tomber pour venir habiter ici, sans connaître personne ». C’est là que ses deux filles naîtront. « L’événement le plus heureux pour moi, celui de transmettre la vie ».

L’autre étape marquante de son parcours hors normes, c’est le titre de champion du monde au Pérou. Les trophées du monde entier ornent sa tanière maraîchine. « J’ai battu cette année-là les sud-américains alors que je ne connaissais pas le Pacifique. Pendant 20 ans, j’ai fait les podiums européens et mondiaux. Quand il y a un championnat du monde, on arrive sur place un mois auparavant pour observer et comprendre le comportement des poissons, sans y toucher. La pêche se pratique au fusil harpon ».

Cette notoriété lui permet de développer une gamme de matériel à son nom. « Je parcourais la côte atlantique régulièrement. Jusqu’à ce que je découvre cet endroit. Mieux que la Camargue ! Enfin, disons plus approprié à mon budget. J’ai acheté 57 hectares, un bulldozer et une pelleteuse, pour créer dix plans d’eau ». Car Jean-Baptiste est un fervent défenseur de la nature. « Elle nous a dotés d’un filtre naturel gratuit avec ces marais que l’homme moderne s’attache à détruire ». Il s’insurge contre la gestion française de l’eau. « En France, on n’est pas gouverné, on est administré par un ramassis d’incompétents qui ne portent aucune attention à la sauvegarde de l’eau, source de la vie ». Il multiplie les SOS auprès des ministres de l’environnement en s’appuyant sur des choses simples et naturelles. « L’anodonte, cette moule énorme, passe 50 ans de sa vie à filtrer l’eau. Pourquoi ne pas l’envisager à grande échelle car elle représente pour moi l’avenir de la ‘planète eau’ tout entière, de la rivière à la mer ? Aujourd’hui on laisse le marais s’assécher en envoyant l’eau à la mer. Résultat : les grenouilles, les poissons et autres espèces dont l’anodonte et les batraciens disparaissent par millions ».

Jean-Baptiste illustre son propos d’exemples très concrets. « Au Bernard, on a fait une réserve gigantesque et on pompe dans la nappe phréatique que l’on assèche. Alors qu’il suffisait de faire une retenue toute simple sur le petit ruisseau ‘Troussepoil’ qui se jette à la mer et qui aurait vu se développer un biotope naturel avec des roselières, des animaux… ».

Son mode de vie, quasi en autarcie, est une réponse à son regard sur le monde. « Depuis que l’humanité existe, l’homme a toujours été un prédateur sélectif. Le virage fatal, ç’a été l’exploitation industrielle de la pêche, une catastrophe. Même le Préfet autorise les bateaux normands à venir pêcher jusqu’à 800 ou 900 tonnes sur nos côtes, au nez et à la barbe de nos petits pêcheurs, quitte à taper dans les frayères. Ils font des ravages détruisant les poissons de toutes tailles, y compris les petits, les œufs, pour être vendus au prix de la farine à poisson, alors qu’on limite à 2 bars la pêche pour les plaisanciers ». Jean-Baptiste ne croit plus en la classe politique. « Elle ne se repose pas suffisamment sur les gens de terrain. Il suffit de regarder pour comprendre. Je crains que dans 20 ou 30 ans, il n’y ait plus d’éleveurs d’huîtres ou de moules vu la qualité des eaux ».

Retracer ses souvenirs à travers les objets qui l’entourent le met de meilleure humeur. Des clous de vieux bateaux, un bol de galérien, du corail rouge, un fanon de baleine… Autant de vestiges qui font voyager son esprit sur les mers du monde. L’ancre qui se trouve à l’entrée de la Tranche est également le fruit de l’une de ses explorations.

Jean-Baptiste vit en harmonie avec les éléments de la nature. « J’ai connu des moments difficiles ; je les mets de côté ». Son message est contenu dans son mode de vie : « Que les gens prennent soin de la nature ! ».