Son patron avait dit ça de lui : « Joël a le goût de l’effort ». Non seulement il le démontrera dans sa vie professionnelle, mais aussi sur son vélo. Le dépassement de soi est moteur pour cet homme toujours très actif auprès de ses enfants ou dans son jardin de 600 mètres carrés. L’ennui, il ne connaît pas.
Il est né à Ardelay et réside depuis son mariage avec Marie-Danielle à Mesnard la Barotière. La ferme familiale de la Barillière est trop petite pour envisager un avenir professionnel. « Mon père est décédé j’avais 8 ans ». Le cocon familial joue son rôle protecteur. « Avec ma mère, ma grand-mère et une tante, j’avais quatre frères et sœurs. J’ai le sentiment que mon père m’a plus manqué par la suite que dans ma jeunesse ». Un jour, il donne le coup de main à un artisan venu monter une charpente bois à la ferme. Il y prend goût et se retrouve quelques mois plus tard chez Briand aux Herbiers. Il gravit les échelons, devient surveillant de travaux, assure les suivis de chantier sur quasi toute la France.
Les déplacements se multiplient. « Je me souviens d’un rendez-vous de chantier à Lille, 1400 kms, levé à 3 heures pour rentrer le soir-même. En rentrant j’ai frôlé l’accident à Nuaillé. Je crois que ça a été le déclic pour faire autre chose ». Le jeune papa n’est pas présent chez lui. « Je démissionne en mai 85 ; mes collègues sont déçus ; le patron a compris ». Joël garde de bonnes relations avec son entreprise. « C’est là où j’ai tout appris. Je me souviens être allé au Gabon pour 3 mois en 1980, laissant ma femme et ma fille à la maison. C’était dur pour moi et pour elles ».
Son expérience de la charpente n’est pas vaine. « L’entretien des charpentes n’intéressait pas les grosses entreprises. Je me suis lancé seul, puis un neveu m’a rejoint au bout de deux mois. Rapidement, on m’a sollicité pour des appentis, des stabulations agricoles… J’aimais bien m’isoler avec ma planche à dessin près d’un étang aménagé. Les racines carrées, les diagonales…j’adorais calculer. Nous sommes montés à 10 salariés plus ma femme qui assurait l’administratif de la maison après avoir travaillé dans la chaussure. Elle est formidable ; c’est ma bouée ! ». À 56 ans l’heure de la retraite sonne pour Joël. « Deux salariés ont repris l’affaire ».
Avant le grand pédalage, petit rétropédalage avec le foot, une passion elle aussi dévorante. « J’ai été joueur et entraîneur, puis je suis devenu président pendant quatre ou cinq ans. Quelques fois, il fallait que j’appelle ma femme pour qu’elle aille ouvrir les vestiaires car je voyais que j’allais être en retard ». Des souvenirs, il en conserve des paquets. « Des chambrages autour du terrain, où les troisièmes mi-temps avec le casse-croûte. L’inauguration du stade Roger Colombel, un frère pionnier du club et aussi de la Tricherie. Le foot remplissait notre week-end, et le lundi, au boulot ».
Joël qui pratique le VTT le dimanche est invité par le club local de vélo, l’ACM (dont il sera président durant 5 ans), sur une randonnée de 100 kms. Il y repique l’année suivante à Chambord. « 270 kms ; on partait à 5 heures du matin pour arriver à 18 heures. Nos épouses étaient sur place ». Le virus de la grande distance le gagne. « 620 kms pour le Bordeaux – Paris ; je l’ai fait à quatre reprises. Comme le rendez-vous mythique des cyclistes : Paris-Brest-Paris. 1230 kms sur environ 90 heures, dont quatre nuits… ». Mais Joël doit renoncer sur cette quatrième édition. « Une blessure à la fesse. Je ne pouvais plus avancer. Et puis j’ai eu comme un remords envers ma petite famille qui ne me laisse jamais tout seul. Je ressassais des souvenirs de personnes disparues depuis la dernière édition, quatre ans plus tôt…J’ai dit : stop ! »
À 60 ans il entreprend de faire le tour de la France, une épreuve officielle jalonnée de 60 points de contrôle. « 5200 kms au total sur un mois, libre comme l’air, décidant de mes étapes selon la distance parcourue dans la journée. Je me souviens d’un hôtel où j’étais absolument seul, des accents et parlers locaux qui changent chaque jour. Ou encore le retour à Mesnard avec 80 ami.es qui m’attendaient. Sacrée émotion ! ».
Pas rassasié, Joël se lance dans le brevet des Provinces avec 536 villes ou lieux à pointer en France. « Je suis rendu à 400. Je quadrille tout le territoire à 40 kilomètres près. Pour le centenaire de la mort de mon grand-père, je voulais être à Verdun, le 11 juillet. J’étais ému quand j’ai vu son nom : Constant Renou. Pour les prochaines expéditions, je songe au vélo électrique. Le règlement l’autorise ». Joël enfourche le vélo à la semaine, 3 fois par an, avec son petit camion, son frigo et son sac. En solo. « En règle générale, je fais entre 10 et 12 000 kms par an ». Soit environ cinq fois le tour du globe depuis un peu plus de 20 ans.
Quand il fait la rétrospective de ses aventures cyclistes, Joël savoure. « J’ai quand même une sacrée chance ! ». Il cite Lelouch. « Les plus belles années de ma vie sont celles que je n’ai pas encore vécues ». Sans oublier d’évoquer ses proches. « Ma femme m’a toujours encouragé. Mes enfants que j’accompagne dans leurs projets. Je leur dois bien ça ». Il conclue en précisant qu’il préfère être acteur de sa vie, plutôt que spectateur. Et d’ajouter : « S’il pleut demain, peut-être que je serai seul sur mon vélo… ? ».
Un vrai personnage ce Joël… Bravo très bon « résumé » et cela ne devait pas être évident !….
Bravo Jean-Marie.
Joel, c’est du monobloc. : il dit, il fait. Une chance de l’avoir comme ami.
Bel hommage et encore beaucoup de Km à faire pour Joël.