Les nouvelles technologies offrent au monde de l’édition des possibilités qui n’existaient pas auparavant. Carole en a fait une opportunité pour celles ou ceux qui veulent laisser une trace. Elle publie leur histoire, dans un beau livre souvent illustré. « C’est toujours très émouvant de rentrer dans l’histoire d’une personne. Et quand je remets le livre à l’intéressé, il y a souvent beaucoup de reconnaissance ».

Carole est une femme de lettres. « L’écriture m’a poussée à aller faire mes études en Chine. Les caractères chinois, c’est extraordinaire, pour moi qui ai toujours aimé les mots. Je suis partie en 1988 pour deux ans. J’étais à Shanghai au moment des évènements de Tian An Men, à Pékin. Je me rappelle des premières manifestations dans les rues où les étudiants revendiquaient la liberté de manière très bon enfant. C’était un mouvement très convivial, très naïf, sympathique. Ça s’est brutalement interrompu ».

Quelques années plus tard, elle découvre l’Amérique du Sud avec son conjoint photographe reporter. « Nous sommes partis quatre ans, au Brésil, en Argentine et en Bolivie entre autres. Avec mon mari, on a parcouru des milliers de kilomètres à la découverte et compréhension des modes de vie. Passer de la Chine à l’Amérique du Sud, ce n’est pas la même chose ».

Mais à l’écouter, sa plus belle aventure c’est tout simplement le livre. « J’ai toujours aimé la littérature, les mots, l’écriture, les langues. Après avoir travaillé dans l’accompagnement des entreprises, dans le développement économique et l’organisation d’évènements, j’ai eu envie de revenir à mes premières amours. J’ai donc repris mes études pour faire un Master 2 à Rennes pendant un an sur les métiers du livre et de l’édition ». Le livre en tant qu’objet lui plait. « Je me suis rendu compte que j’aimais créer des livres pour recevoir les écrits des autres. Et peut-être les miens le jour où je trouverai le temps ? ».

L’impression numérique permet aujourd’hui d’envisager des petits tirages, seulement quelques exemplaires pour la famille ou les proches. « On peut se permettre de se faire plaisir avec un livre souvenir. L’exercice a même des valeurs thérapeutiques en travaillant la mémoire. Certains viennent avec un texte déjà écrit. Pour d’autres, je fais des suggestions de réécriture. Cela suppose de la confiance et une vraie collaboration ». Elle publie aussi des textes produits en ateliers d’écriture, dans une collection baptisée ‘les jubilations de l’écriture’. « Les gens qui aiment écrire se rencontrent sous la houlette d’un animateur. Ils lâchent le stylo et se laissent porter par les mots ». Elle accompagne également les entreprises, les collectivités pour les magazines ou newsletters.

S’il fallait trouver un élément positif au confinement, tout au moins le premier, c’est peut-être que les gens se sont mis à écrire ? « Certains ont choisi cette période parce qu’ils avaient du temps pour eux-mêmes ou pour travailler avec leurs proches. Plus généralement, le besoin d’écrire est lié à une époque qui connaît des bouleversements extraordinaires dans les modes de vie, et notamment la vie à la campagne ».

Elle observe le monde moderne sans trop de nostalgie. « J’ai une fille de 18 ans et je vois bien qu’on est différentes. Même je lui ai transmis un certain nombre de choses, je vois bien qu’elle est du monde du numérique, du téléphone, de Netflix. C’est comme ça ». Elle ne reste pas dubitative pour autant, considérant qu’il y a des combats à mener. « Pour la planète, évidemment. Il ne faut pas tout gâcher. Ce qui me gêne le plus, c’est peut-être la rapidité où vont les choses. La course à l’échalote, ce n’est pas mon truc. Tout vient à point à qui sait attendre ». Des moments durs, elle en a connus. « Je me considère plutôt du côté des chanceux ; c’est sûr ».

La contemplation lui procure des forces quand elle en a besoin. « Je suis très contemplative. Il suffit que je m’assoie et que je regarde l’océan pendant quelques minutes. Ce n’est pas de la méditation. C’est comme si l’océan me transmettait de l’énergie ». L’autre ressource, c’est la littérature classique. « Je lis deux pages de Maupassant, de Flaubert ou Stendhal, et ça va tout de suite beaucoup mieux ».