Il a l’accent chantant du sud et le regard rieur. Artiste innovant et renommé dans le milieu équestre, Jean-Marc est aussi un créateur de génie. Il sera précurseur en retirant le mors du cheval pour ses spectacles. Ni selle, ni brides. Il bouleverse les usages, obtient de sa monture l’obéissance sans le moindre coup de cravache, à l’œil et à la voix. Saltimbanque sur la piste, il devient méticuleux devant son écran quand il crée un gyropode fauteuil roulant, un robot exosquelette ou encore une voiture téléguidée conduite par un chien. Un génie qui sait raison garder. « Le cheval t’aide à rester humble ».

Il a grandi au pays de Jean de Florette. Ses parents, agriculteurs, achètent un poney lorsque Jean-Marc a 5 ans. « Sans doute que ce poney m’a beaucoup appris, moi qui ne supportais pas les règles en cours d’équitation. Avec lui, comme par la suite, j’ai toujours monté à ma façon ». Il découvre qu’il peut monter les chevaux sans le mors. « J’étais le seul à le faire. Je ne savais même pas que je faisais quelque chose d’extraordinaire. Si j’avais suivi les règles, je n’aurais jamais eu l’idée de faire les spectacles que j’ai proposés ». Il a dû abandonner son métier d’ingénieur réseau en informatique pour se consacrer pleinement à ce qui jusqu’ici n’était que l’amusement du week-end.

Cette approche nouvelle de la relation avec le cheval tape dans l’œil pourtant exercé de professionnels. « On m’a rapidement poussé vers les gros salons, Cheval Passion à Avignon ou Equitana en Allemagne, la référence mondiale. Les médias s’en sont emparés. L’éperon, magazine plutôt académique, a titré sa une : ‘Jean-Marc Imbert libère le cheval’ ». S’en suit un tour du monde avec deux faits marquants parmi beaucoup de très beaux souvenirs. « Un premier grand spectacle en 1996 à Stockholm avec 25 000 spectateurs, et surtout Equitana en Allemagne, la référence mondiale, où les 9 000 spectateurs font un ‘waouh’, quasi à l’unisson. J’en ai pleuré ». Ce salon allemand, Jean-Marc le fera à six reprises avec à chaque fois des nouveautés. « Il faut toujours surprendre ».

Dans l’un des premiers numéros, Jean-Marc était déguisé en indien. « J’étais grimé et cela me permettait de passer outre ma timidité. Seul je n’étais rien. Avec mon cheval, on me disait : « T’es super ». Ça ne m’empêche pas d’avoir un tract de fou avant chaque entrée en scène aujourd’hui encore ». Son succès ne l’enivre pas, même s’il le savoure. « Les valeurs de la vie sont validées par le cheval. Notamment l’humilité ».  Son cheval Mikito, a laissé son nom à la carrière d’animation du salon Equita à Lyon. « Un bel hommage pour ce cheval exceptionnel ».

Ni les chevaux, ni leurs cavaliers ne sont éternels. « Je m’étais dit que j’arrêterais à 50 ans. J’en ai 53, j’ai un peu débordé. Plusieurs de mes proches amis ont mal vécu la cinquantaine. Les contrats plus difficiles à décrocher, une créativité un peu plus terne et des chevaux qui vieillissent. La même année, j’ai deux copains très proches qui ont mis fin à leurs jours, dont un qui artistiquement était un génie ». Difficile de décrocher d’un métier passion. « Dans ma tête je sais que ça va s’arrêter. Physiquement je me sens un peu diminué en voltige, mais ce n’est pas un problème. Je suis dans l’acceptation ». Courir le monde l’excite moins. « En 2014, j’ai parcouru 22 000 kms en deux mois et demi. C’est bon. Je ne veux pas faire le tour de trop ». Aujourd’hui il privilégie les contrats sur plusieurs semaines. « Ma femme et ma fille sont avec moi. J’apprécie ».

Le ressort, il le trouve aussi dans ses passions de toujours, loin d’être enfouies, l’électronique et l’informatique. « J’ai toujours fabriqué des machines, des effets spéciaux pour les spectacles. J’ai développé un appareil que je mets sur le dos du cheval qui me permet de gérer le son ou les vidéos. J’ai aussi un cheval dragon qui crache le feu ». Son inventivité ne se limite pas au monde du spectacle. Il suffit d’aller voir son site internet* pour comprendre que l’esprit de Jean-Marc est en ébullition permanente. « Les vacances pour moi, c’est un peu dur. Maintenant j’arrive à tenir une semaine ! ». La peur du vide peut déstabiliser notre acrobate cavalier. « Il faut que je sois débordé pour être heureux. Je me donne des challenges en permanence ».

Le monde du spectacle a beaucoup souffert pendant la pandémie. « Le spectacle équestre en particulier. Dans notre métier, il faut deux ans avant un retour à la normale. Si j’avais 30 ans je serais angoissé ». Il peste sur le climat actuel. « On nous prend pour des oignons. Moi qui suis un peu mathématicien, je ne comprends plus les chiffres qu’on nous donne au regard des autres causes de mortalité. Je n’ai pas envie de me faire vacciner ».

Jean-Marc ne redoute pas de perdre l’affection de son compagnon cheval. « J’en ai tellement fait. Je suis peut-être un peu saturé ? ». Alors il se lance bride abattue vers de nouveaux horizons. « L’important c’est de ne pas s’arrêter. Aujourd’hui, je suis super heureux de retrouver mon métier de départ ».

(*) imbertjeanmarc.com et jmi-conception.com