Voici un peu plus de vingt mois qu’Anne a endossé l’écharpe de maire de la commune de l’Herbergement, une responsabilité qu’elle aborde de façon sereine. Chez elle, le verbe est direct, sans ambages ni calculs. Juriste de formation, elle s’est intéressée depuis aux ressources humaines. L’ambition politique n’est pas son carburant ; elle se sent simplement animée par le sens des responsabilités et de l’intérêt général.
Sa spécialité universitaire est le Droit social. Arrivée en Vendée, elle l’appliquera au domaine agricole en tant que juriste conseil au sein de la FDSEA. « J’ai fait du Droit plus par tradition familiale que par conviction. Par contre, la branche sociale m’animait vraiment. En plus du conseil, j’ai participé au développement des services de remplacement agricole sur l’ensemble du département. » Les nombreux déplacements et les réunions en soirée auront raison de son énergie. « À 35 ans, j’ai fait le choix d’arrêter de travailler ; un choix personnel pour mes enfants, également pour mon mari dirigeant d’une société qui le prenait énormément. »
Elle ne reste pas à rien faire pour autant. « Je passais beaucoup de temps avec et pour mes enfants. Membre de l’OGEC pendant huit ans, je suis devenue présidente pour cinq ans. J’étais aussi impliquée au sein du club de basket. » Elle en profite pour faire un Master RH. « Je l’ai fait en alternance sur 18 mois. J’ai terminé complètement usée. » L’heure n’était pas encore à s’engager dans la politique locale. « La chose publique m’intéresse depuis toujours. Il y a peut-être un terreau familial avec mon père qui a été élu, mon frère qui a eu quelques ambitions ? C’est l’organisation de la ville qui nous intéresse , pas la politique politicienne. »
L’idée d’un commerce la titille. Un projet d’installation qui finalement se transforme en salariat. « J’étais hésitante à postuler. Mon mari m’encourageait. J’avais aussi mes petites exigences, liées aux contraintes d’une mère de famille. Banco. Je suis devenue vendeuse en boulangerie, un métier qui faisait écho à celui de mon grand-père. L’occasion d’apprendre à connaître beaucoup de gens que je ne voyais pas à l’école ou au sport. » Anne y restera trois années.
Du côté de la mairie, les choses bougent à un an de l’élection. « Mon mari discute avec le maire de l’époque en lui disant que le moment était peut-être venu pour moi de m’engager. Pas forcément pour le fauteuil de maire, mais aucun adjoint ne voulait y aller. Sans doute suis-je naïve par moment, mais cette responsabilité ne me faisait pas peur, pas plus qu’une autre. » Le tuilage avec l’ancien maire durera près d’un an, à raison d’une heure par semaine. « Nous faisions le tour des dossiers. Je partais sans la moindre expérience. Il a fallu aussi reconstituer une équipe avec le renouvellement des ¾ des conseillers. » Vingt-trois conseillers d’âges et d’horizons divers pour gérer une commune en plein essor avec ses 3500 habitants. « Il y avait une confrontation des idées neuves avec des plus anciennes. C’est une richesse à découvrir. »
La mairie est parfois le guichet des réclamations. « Quand on a mis toute notre bienveillance et notre objectivité dans une décision, il faut l’expliquer, même si ce n’est pas du goût de tout le monde. » L’intercommunalité occupe une place de plus en plus importante. « Là, je découvre un monde déjà un peu plus politique avec les stratégies et les ententes. Je ne suis pas de cette mouvance. Ça ne m’empêche pas de prendre des responsabilités au sein de la Communauté d’agglo ‘Terres de Montaigu’. Il y a là des gens expérimentés qui m’accompagnent ; c’est précieux. »
La lenteur administrative freine les ardeurs. « Il ne faut pas renoncer pour autant, quitte à bousculer les règles du jeu. Je suis encore une jeune élue, dans l’écoute et le dialogue. Peut-être que demain, je devrai m’affirmer plus en leader ? » Par conviction plus que par ambition. « Je n’ai ni ambition politique, ni le besoin de reconnaissance pour avancer. C’est sans doute pour ça que je vis bien cette expérience. » Elle découvre à ses dépens les aléas de la vie publique. « Des gens s’expriment de façon assez violente par les réseaux sociaux, véhiculant parfois de fausses informations. Pour ma part, je préfère le dialogue et la rencontre. » Son cap est clair. « Ce qui m’anime, ce sont les gens. J’ai l’envie de faire pour eux, avec eux, toujours dans l’intérêt général. »
La volonté d’entreprendre ou de réformer chez l’élue se confronte à une réglementation assez rigide. « Quand je vois la lourdeur administrative, il vaut mieux être très déterminé. Ça ne conviendrait pas à un chef d’entreprise. Il faut aussi ne pas décourager les jeunes élus qui croient encore à l’engagement public. » Elle salue au passage l’engagement des équipes administratives et techniques. « Rien à voir avec ce qu’on peut lire parfois. Ils sont pleinement investis. » L’environnement est à ses yeux une priorité. « Rien n’est perdu si on se retrousse les manches. Ce n’est pas pour faire bien dans le tableau ; c’est une nécessité incontournable. » Un engagement qui se décline concrètement par un projet d’exploitation en maraîchage bio. Il permettra d’approvisionner les restaurations communales, de l’école à l’EHPAD. « L’habitat suppose à présent des nouvelles règles qui bousculent la culture locale. Il faut raisonner avec de l’habitat collectif ou des jardins partagés pour consommer moins de foncier. »
Sans être féministe militante, elle considère importante la place des femmes en politique. « On ne place pas les curseurs aux mêmes endroits que les hommes. Notre attention aux gens est peut-être différente ? Nous sommes souvent plus pragmatiques. Il faudrait trouver plus de moyens pour que de jeunes femmes puissent accéder aux responsabilités. »
Anne consacre un temps important à la lecture. « Je lis beaucoup de romans, d’essais. J‘ai toujours 2 ou 3 livres en chantier. Ça peut aller d’une BD comme Sapiens, à ‘l’Utopie mode d’emploi’ de Sandrine Roudaut. J’aime l’utopie qui mène à des choses très concrètes. » Ses inspirations sont multiples. « Elles trouvent leurs sources dans la lecture, les rencontres et les voyages. »
L’engagement de maire lui prend beaucoup de temps. « Mon prédécesseur m’avait vendu un petit mi-temps…Mais j’ai la chance de gérer mon temps comme je l’entends en dehors des réunions. Je peux encore faire des trajets pour le basket avec les enfants, faire mes courses et gérer le quotidien d’une maison. » Un engagement qu’elle n’aurait peut-être pas pris seule ? « J’ai le sentiment que mon mari croit plus en moi, que moi je ne crois en moi. Sans lui, je n’irais pas aussi loin. »
Bel exemple de la (du) maire idéale loin de toute considération politique avec notamment l’année de tuilage certainement très bénéfique pour le nouveau conseil municipal et lés
Administrés.