Depuis longtemps, Sonia a la fibre entrepreneuriale. Elle a fait ses armes dans le milieu associatif en présidant le moulin et la fête de la meunerie qui font la réputation de Nieul sur l’Autize. Curieuse de tout, elle empruntera les chemins de la communication pour en faire son métier. Aujourd’hui, cette maman de 3 filles dirige une entreprise dont l’univers est plutôt masculin.

Rien ne la prédestinait à prendre les rênes d’une entreprise. « Ma mère native de l’ile d’Yeu est issue du milieu des marins pêcheurs, mon père du milieu agricole. Ils étaient tous deux ouvriers d’usine ». Si ce n’est sa détermination profonde. « Le premier jour de Fac le prof nous avait demandé notre projet à l’horizon de 20 ans. Toutes les réponses étaient à l’unisson : responsable de com’, chef d’agence, annonceurs…J’étais la seule à répondre : chef d’entreprise ». C’est pourtant une maîtrise en communication qu’elle décrochera au Futuroscope. Un cursus privilégié pour observer le monde de l’entreprise.

Plutôt que plonger tête baissée dans l’univers de la communication, Sonia fait le choix de l’intérim pour découvrir différents secteurs d’activité. Elle se donne 5 ans pour cette exploration du monde du travail. « J’ai travaillé dans une imprimerie, une chambre consulaire, dans la banque, l’assurance… ». Elle se fixera au final dans un cabinet de développement local. « Nous accompagnions les collectivités pour les zones industrielles, pour le SCOT (Schéma de Cohérence Territoriale), etc… ». Puis elle renoue avec le terrain qu’elle affectionne, celui de la communication. Vingt-cinq années niortaises, au total, avant de revenir aux sources familiales pour racheter une affaire.

Elle songe dans un premier temps à reprendre un commerce de proximité pour le redynamiser. « J’imaginais en complément de l’épicerie une cave à vin avec une guinguette ». Elle sollicite l’avis de ses proches, parmi lesquels celui de Guy Limoges, un chef d’entreprise aguerri, voisin de la famille. « Il me met en garde. Travailler en milieu rural après 25 ans de vie citadine… ». C’est pourtant lui qui viendra frapper à sa porte deux ans plus tard. « Il me dit : toi qui veux une affaire, pourquoi tu ne rachèterais pas mon entreprise ? ». L’activité tient à la création, rénovation et entretien de terrains sportifs, à mi-chemin entre les TP et le travail de paysagiste. « Un univers plutôt masculin qui m’a valu la défiance des banques dans un premier temps. J’ai bénéficié de l’accompagnement du réseau ‘Vendée Entreprendre’ ». Depuis 7 ans, Sonia tient la barre de cette affaire qui compte dix salariés. « Nous avons des effectifs supplémentaires en pleine saison ».

Elle fait ses premiers pas. « Il n’y a pas d’école de chef d’entreprise ; c’est un apprentissage au quotidien, sur le terrain ». Femme de relations, son statut de dirigeante conforte ses choix. « Je ne suis pas start-uppeuse ; juste dans la continuité d’une affaire créée 25 ans plus tôt, une courroie de transmission. J’apporte ma touche ». Elle n’est pas indifférente au fait d’assurer un emploi pour ses salariés. « Mon père, un temps cégétiste, me disait sur le ton de la boutade : on a beau dire que les patrons c’est des ‘cons’, toute le monde en cherche un ».

Les collectivités constituent l’essentiel de sa clientèle, un milieu qui ne lui est pas étranger. « Notre secteur va du sud de Nantes au nord de Bordeaux jusqu’à Limoges. Dans certains départements, c’est l’interco qui gère. En Vendée, c’est souvent monsieur le Maire qui décide pour son terrain de foot ». En réalité, c’est la diversité des rencontres qui agrémente son quotidien. « Pas une journée ne ressemble à l’autre, entre le foot, le rugby, le golf ; du directeur technique d’une interco à l’employé unique d’une petite commune qui fait tout, du cimetière au complexe sportif ».

L’entreprise n’est pas son seul port d’attache. « Celui qui est primordial, c’est le port familial. J’ai eu la chance de rencontrer l’homme qui me plait, avec qui nous avons eu trois filles ». Lorsqu’elle évoque son parcours, elle cite ce professeur d’économie qui la tempère. « J’étais partie pour de longues études, un défi pour une fille d’ouvriers ». Le milieu associatif est aussi une bonne école de la vie. « La diversité des gens qui siègent au conseil d’administration, la fonction employeur, les enjeux pour pérenniser l’association ». Sonia retrousse encore les manches pour l’asso, bien qu’elle n’en soit plus la présidente. « Samedi, nous allons faire des fagots de bois pour le four du moulin. Nous serons une quinzaine de personnes, deux samedis de suite ».

Elle fait partie de celles qui voient le verre à moitié plein lorsqu’elle évoque les enjeux de société. « Certes on est dans un virage, mais de bonnes choses apparaîtront. Oui ce qu’on vit actuellement peut déséquilibrer mais ce sera pour mieux rebondir ». La maxime de l’un de ses amis est un peu sa philosophie. « Il y a les jours ‘avec’ et les jours ‘sans’, et les jours ‘sans’ il faut bien faire ‘avec’ ». À travers son métier, elle voit les choses évoluer sur le plan environnemental. « Quand j’ai commencé, une commune sur deux pratiquait le traitement sélectif sur les terrains ; aujourd’hui c’est moins d’une sur dix. Tout le monde s’adapte ». À ses yeux, le Covid a même ses vertus, dans la maîtrise des outils technologiques par le plus grand nombre. « Les comportements nouveaux chez les jeunes, les colocs, la copropriété pour avoir une nounou en commun, c’est magique ».

S’il y a une ombre au tableau, c’est la critique à tout crin qui l’exaspère. « À 50 jours des élections, la campagne ne semble faite que de petits coups bas. On ne laisse pas les gens s’exprimer ». Elle en regretterait presque les effets bénéfiques du premier confinement. « Ça n’a pas duré, mais il y a eu quelques semaines avec un climat de bienveillance ; on sortait applaudir les infirmières le soir. Il y avait du respect. Dommage qu’on n’ait pas gardé ça ». Exemple à l’appui, elle dénonce l’emballement médiatique. « Le discours de Simone Veil sur l’avortement, aujourd’hui encensé, a aussi été massacré en son temps ».

Marquée par la rencontre de Sœur Emmanuelle alors qu’elle est en seconde, Sonia a retenu le message de l’Amour plus fort que la mort. « L’Amour, c’est ce qui construit les mômes, le couple, une équipe… ». Sonia croit en la protection des siens. « Ma grand-mère, ma mère qui nous ont quittés, je suis sûre qu’elles continuent de nous protéger. Ça me donne de la force dans les moments plus difficiles de les savoir près de moi ». Des convictions qui parfois font sourire ses amis. « Eux aussi sont pour moi des piliers, comme ma famille ».