Le Grand Lux est sous les feux de l’actualité cinématographique aux Herbiers, et avec lui, ses bénévoles. Moïse Maindron est la cheville ouvrière de l’association gérante qui compte aujourd’hui près de 70 bénévoles. Conseiller pédagogique la semaine, il passe une bonne partie de son weekend pour le cinéma. Une aventure collective qu’il connaît sur le bout des doigts.

Le dernier tour de verrou de la salle Jeanne d’Arc (connue un temps sous le nom ‘La Dernière Séance’ puis le ‘Grand Ecran’) ne s’est pas fait sans un brin de nostalgie, rapidement atténué par l’envie de gagner les locaux flambants neufs de la Tibourgère. « J’ai vécu tellement de choses dans cette ancienne salle. J’avais 17 ans lorsque je suis devenu bénévole. Avec les copains, nous avions à peine 20 ans, et on nous confiait la gestion d’un cinéma. Quelle marque de confiance ! Notre investissement sans compter allait de pair. Le noyau dur d’une quinzaine de personnes était solide. A l’époque, j’étais en première à Jean XXIII ; je faisais la séance du mardi et me couchais après minuit. Un truc de fou quand j’y repense ».

Bénévole depuis 1993, Moïse a fait la programmation de 2000 à 2004, puis de 2011 à aujourd’hui. Il est devenu président en 2014. « Le plus drôle dans l’histoire c’est qu’avant que je fasse la programmation, elle était réalisée par… Rodolphe Merlet, lui qui nous rejoint aujourd’hui comme directeur de la structure, après avoir été vingt ans au Cinéville de la Roche sur Yon. Il a fait ses armes ici ; comme quoi ». Le binôme se connaît bien. « Il était professionnel et m’a conseillé lorsque j’ai pris la programmation du Grand Ecran ».

Le multiplexe cinq salles est l’aboutissement d’un travail de cinq années. L’inaccessible rêve devient réalité. « Le projet était dans nos têtes depuis 15 ou 20 ans, plutôt en version trois salles. Lorsque la mairie a décidé 5 salles, on s’est interrogés. Si nous n’avions pas suivi, c’était la disparition pure et simple de l’association, le coup d’arrêt d’une aventure partagée par tant de bénévoles… Il fallait qu’on y aille ». La Délégation de Service Public rendue obligatoire par le Code des marchés publics rend l’attribution incertaine. « Il y a eu d’autres candidatures pour l’exploitation. Notre motivation était extrêmement forte, mais ça ne suffit pas pour l’emporter. Alors nous nous sommes entourés. Ce n’était pas parce que nous étions amateurs que nous devions nous sous-estimer. Notre projet tenait bien la route sur le plan des animations et de la programmation. Il y a quand même eu du stress jusqu’au bout ».

Programmer est un équilibre subtil entre le divertissement et des films plus engagés. « Le cinéma est un art qui reflète la société avec un point de vue qu’on partage ou pas. Les films grand public sont plus consensuels. Il en faut pour tous les goûts. C’est toujours agréable de voir un bon film ». Moïse était fasciné à une époque par les Spielberg, Cameron, Ridley Scot. « Aujourd’hui, je trouve Christopher Nolan très habile ». Il aime la jeune génération d’acteurs : « Jessica Chastain, François Civil, Pierre Niney… »

On se demande parfois si l’implication bénévole profite professionnellement, ou l’inverse ? « J’ai appris plein de choses avec le cinéma. Le projet ayant été copiloté avec la mairie, je connais mieux les rouages d’une collectivité. D’un autre côté, je travaille dans une administration à la Direction Académique. Ça m’a aidé dans la vie associative et inversement ». Moïse est enseignant, professeur des écoles. « Aujourd’hui, je suis formateur des enseignants aux usages numériques dans les classes primaires et maternelles ».

Marié, père de trois enfants, il s’interroge sur la société. « Concernant le réchauffement, tout le monde s’accorde à dire qu’il faut changer de direction, mais qui tient le volant ? pour aller où ? Chacun a son rôle à son échelle, mais le véritable changement passe par des décisions qui viennent d’en haut ». Comme beaucoup, il s’essouffle de cette pandémie qui n’en finit pas. Il aime prendre du recul pour ne pas réagir à chaud devant certaines situations. « Au cinéma comme au boulot les problèmes sont légion ». Alors pour s’échapper, rien de tel qu’un bon film.