Doué pour les maths, Guy Loizeau a l’esprit cartésien. Trois périodes ponctuent sa vie : son enfance, son engagement dans l’Armée de Terre, son implication associative avec comme fait d’armes, la reconstruction de l’EHPAD Saint Joseph à la Verrie dont il sera président. Sa carrière militaire de 36 ans se divise également en trois périodes équilibrées. « J’ai fait un tiers dans les écoles, soit comme instructeur, soit en formation. Un autre tiers avec la troupe, dans les régiments. Enfin, le dernier tiers à l’Etat Major des Armées, puis de l’Armée de terre ». Expert en artillerie, il commandera la force Hadès (missile nucléaire au moment de la Guerre Froide) de 1994 à 1995.

Comme un certain nombre de ses camarades de l’époque, Guy, natif de la Verrie, n’a connu son père qu’à l’âge de six ans. « J’avais 3 mois quand il est parti à la guerre. J’ai passé cette période avec ma grand-mère et ma mère. Je ne me souviens pas avoir été malheureux pour autant. A l’occasion de Noël 42 ou 43, ma mère avait réussi à trouver une orange. Je ne savais pas ce que c’était. Je l’ai frappée au pied, croyant que c’était une balle ». Son père revenu retrouve sa place comme contremaître au tissage à Rochard. « J’allais à l’école publique de Saint Hilaire de Mortagne. Je me souviens qu’on nous avait emmenés sur les bords de la N160 pour voir passer le blindé qui ramenait le corps du Maréchal de Lattre à Mouilleron. J’avais 13 ans ; ça m’a marqué ». Il poursuit ses études à Sainte Marie à Cholet, en maths élem. C’est là qu’il décide avec un copain de préparer Saint Cyr. « On a été accepté au lycée Hoche de Versailles, tout un symbole puisque Hoche était connu pour être le pacificateur de la Vendée. A 20 ans, j’étais reçu à Saint Cyr ».

Après les deux ans passés à Saint Cyr Coetquidan, il choisit l’artillerie. « Les accords d’Evian venaient d’être conclus. Je suis parti en Allemagne 7 ou 8 ans, à Mulheim, puis près de Sigmaringen sur les sources du Danube. Ensuite, après l’Ecole d’Etat Major, j’ai été affecté comme commandant de batterie au 1er régiment d’artillerie de Montbéliard (régiment très ancien où avait servi le Lieutenant Bonaparte ». Toutes les mutations sont marquées par un franchissement de grade. « Capitaine en 1968, Commandant en 75, Lieutenant-colonel en 79, Colonel en 84 où il prend le commandement du régiment de Montbéliard ». Il connaîtra un épisode difficile. « J’ai eu un capitaine écrasé par un char. Avec ma femme, nous sommes allés à Strasbourg annoncer le drame à sa femme qui a très mal réagi, me reprochant ne pas l’avoir fait muter plus tôt. Ce n’était pas une décision de mon ressort. Il faut encaisser ».

A 35 ans, le capitaine Loizeau fait une formation d’ingénieur à l’école nationale des techniques avancées, une école d’application de Polytechnique, puis l’école de guerre. « Après deux ans comme commandant en second au 60ème régiment d’artillerie de Canjuers Draguignan, j’ai été muté à l’Etat-Major des Armées à la division ‘emplois’ ». Fort de son expertise, on lui confiera le programme Hadès (du nom du dieu du feu), une brigade de l’Armée de terre, en charge du missile nucléaire, l’ultime avertissement en cas d’attaque des forces du pacte de Varsovie. « J’ai commandé cette force en 1994 et 1995. L’URSS ayant mis le genou à terre, l’Hades perdait le rôle pour lequel il avait été conçu ». Il sera démantelé quelques années après.

« Ma carrière, c’est celle de la Guerre Froide » affirme rétrospectivement le Général Loizeau. « Pour moi le secret de la réussite est de commander avec le cœur. Si on a la confiance et qu’on est accepté, les choses vont naturellement. L’autorité est parfois nécessaire. Il faut savoir taper du poing quand ça ne va pas ».

Il revient au pays natal en 1995 où il souhaite s’investir. « Je suis rentré dans le conseil d’administration de la maison de retraite Saint Joseph. Après la première réunion de bureau, je suis devenu président. Avec le directeur on a lancé le grand chantier de la reconstruction, un programme de 9 millions d’euros ». Celui qui comme officier du programme Hadès a travaillé avec les plus grandes entreprises françaises est à son affaire. « Un programme d’infrastructure, c’est d’abord l’expression des besoins (le cahier des charges), le plan de financement et enfin le suivi du chantier ». A cette époque, sa mère, centenaire, est résidente de l’établissement.

Aujourd’hui il se considère comme un autre. « Depuis que mon épouse est décédée, quatre ans après le décès de ma fille, il me reste un fils qui habite à Paris et qui vient souvent me voir. Ici, ma famille, ce sont mes copains, mes activités comme la boule en bois au sein de l’amicale détente loisirs. Je reviens d’un voyage en Italie, un bon moment. Je suis aussi impliqué dans toutes les cérémonies patriotiques ». Son savoir-faire en la matière est apprécié et reconnu dans tout le canton.

Les insignes et autres distinctions ornent son bureau. L’Armée est toujours sa famille. « Nous étions une centaine récemment au rassemblement des 60 ans de la sortie de Saint Cyr sur une promotion de 500. C’est pas mal ». Il suit naturellement l’actualité. « L’ennemi aujourd’hui c’est le terrorisme, un ennemi difficile à identifier ». L’abandon du service militaire se tramait alors qu’il était à l’Etat Major des Armées. « À l’époque de l’opération Daguet, lors de l’invasion du Koweit par l’Irak, le Président Mitterand ne voulait engager aucun appelé. Il a fallu constituer et mettre sur pied des régiments professionnels. On n’avait plus les moyens de faire un service national juste et universel (3 jeunes sur 5 effectuaient le service) ». Le Général de brigade est officier de la Légion d’Honneur.

En guise de conclusion, le Général Guy Loizeau cite de Gaulle, « celui qui n’a pas accepté la reddition et qui a permis à la France de se relever ». Un adepte du principe de subsidiarité. « Ma manière de commander reposait sur la confiance réciproque, en rendant responsable, chacun à son niveau, des décisions à prendre ». Et de rappeler au final : « on peut commander avec son cœur et par amitié ».