Marie-Reine a le verbe rieur et la parole généreuse. Elle habite le charmant village du Vieil sur l’île de Noirmoutier, vit seule dans sa maison soignée, depuis le décès de son conjoint, il y a 25 ans. Les souvenirs sont précis dans son esprit. Le secret de sa longévité ? « Rire » dit-elle spontanément.

La maison qu’elle occupe appartient à la famille de son compagnon, Monsieur Kowalski, médecin à la Chapelle Basse Mer. « C’était le médecin de la famille. Un jour il a demandé à ma mère  que j’aille le voir. On est devenus amis. Allez savoir pourquoi ? Nous avions 17 ans de différence. Quand il a voulu arrêter de travailler, nous sommes venus ici. J’ai l’usufruit de la maison ».

Marie-Reine était commerçante. « Je vendais de la confiserie, des chocolats, de la pâtisserie. Mon commerce était bien placé à Nantes. Il y a peu de temps, j’ai croisé quelqu’un qui s’est mis à sourire en me regardant. Enfant, il venait au magasin. Il m’a reconnue. Ça arrive de temps en temps ; ça fait plaisir ».

C’est dans une boulangerie pâtisserie qu’elle fait ses armes à l’âge de 13 ans. La guerre est à la veille d’être déclarée. « Nous étions cinq enfants. Tout était fermé à Nantes. Il n’était pas possible de faire des études. Comme j’étais bavarde, on m’a dit que je serais bien commerçante ». Les bombardements vont rapidement se faire entendre sur la région nantaise. « Les anglais bombardaient les ponts qui enjambaient la Loire. Papa avait fait une tranchée dans le jardin, assez éloignée de la maison. Nous nous y réfugiions quand ça grondait ; on était plus en sécurité que dans la maison ».

Autre souvenir précis pour Marie-Reine, c’est la cueillette du muguet. « Les voisins étaient maraîchers. Ils étaient pratiquement les seuls à faire du muguet. Les trois jours qui précédaient le 1er mai, on faisait les bouquets qui étaient expédiés sur Paris, ceci, nuit et jour. Ils ont fait fortune avec ça ».

Elle adore les toutous, compte 27 photos de chiens dans son séjour, dont son dernier, mort il y a 2 ans. « J’aime beaucoup les promeneurs qui ont un chien. Quelquefois je les arrête, j’embrasse le chien, jamais le maître » dit-elle d’un sourire malicieux. L’humour est indispensable. « Je suis fan d’Olivier de Benoît lorsqu’il évoque sa belle-mère. Il chante admirablement des très vieilles chansons. Ce qui me fait rire, je n’ai pas besoin de le noter pour m’en souvenir ».

Elle ne redoute pas la vieillesse. « Je m’en fous comme de l’an 40 ! Si ce n’est que j’ai de l’arthrose partout. Quand je ne vois personne de la journée, j’ai quand même un peu le cafard le soir ».  Elle retrouve le sourire avec l’évocation des voyages avec son compagnon. « Il faisait beaucoup de photos, les oiseaux en particulier. Nous sommes allés dans le grand Nord pour en voir un qu’il voulait prendre absolument. Je n’ai plus le nom. Je me souviens que nous avons pu l’observer 8 minutes. Il était très très content, moi aussi du coup ».

« La place de l’argent est trop importante aujourd’hui. Les gens ne voient que par leur situation, le m’as-tu vu. Je déteste ça. C’est pire aujourd’hui qu’il y a quelques années » déplore-t-elle avant de retrouver son rire contagieux.