Pour boucler son cycle d’études dans l’environnement (bac + 5), Vanessa s’est spécialisée sur le déclin des pollinisateurs, en pleine problématique Gaucho Régent. « C’était alarmant de voir cette mortalité massive des abeilles devant les ruches ». Le constat sonne comme une évidence à la fin des études. La réalité est un peu plus nuancée face aux enjeux et la compréhension des blocages. Plutôt que le militantisme pur et dur, elle fait le choix de vivre au milieu des abeilles. Une activité qui lui laisse du temps pour sa petite famille, et pour l’association Spot dont elle est secrétaire.

Plusieurs stages vont jalonner son parcours d’étudiante. « La folie de Fanfarine au Poiroux, un site pédagogique avec un agriculteur militant. Les abeilles ont tiré la sonnette d’alarme. Outre l’enjeu écologique, il y a aussi des intérêts économiques. La menace est la même pour les papillons, mais on en parle moins ». Vanessa garde un super souvenir de son expérience au sein de l’ONG Terre d’Abeilles en Indre sur le processus d’homologation des produits phytosanitaires. Elle revient dans le bocage et bosse pour un bureau d’études agricole qui la confronte à une autre réalité. « Humainement, je n’étais pas en phase. On ne partageait pas les mêmes valeurs. Mais j’ai appris énormément sur le milieu agricole. Au bout de 4 ans je me suis dit : allez, tu peux devenir apicultrice ».

Une série d’évènements bouscule Vanessa. « Le bureau d’études a été racheté, j’ai perdu mon papa et j’étais enceinte. Ça m’a donné la force pour me décider à m’installer. Avant j’étais un peu fébrile, redoutant le potentiel échec. Et puis le fait de voir mon conjoint, musicien chanteur, qui arrive à vivre de sa passion, ça m’a donné envie ». Elle fait une année de formation de responsable d’exploitation apicole pour structurer son projet. « Aujourd’hui, j’ai 220 colonies d’abeilles sur plusieurs ruchers répartis dans le bocage et un dans le marais. Je fais des miels polyfloraux : de printemps ou du ‘toutes fleurs’, du tournesol et du sarrasin. Les années qui sont belles, je fais un peu de miel d’acacia, même si le bocage est moins favorable pour celui-ci ».

Voici donc quatre ans qu’elle est installée. « J’ai été super bien accueillie par le milieu des professionnels ou amateurs chevronnés. Une apicultrice de Ste Florence, Christiane Vinet, m’a conseillée de mettre le paquet sur les ruches et les essaims en priorité, et elle m’a donné accès à son matériel et sa miellerie. C’est génial ». Ses ruchers sont placés chez des particuliers ou des fermes bio. « J’en ai mis aussi chez des agriculteurs conventionnels. Je me souviens d’un qui était gêné d’avoir traité son blé. Ce n’est pas à moi de juger ce qui est bien ou pas. Mais que ça déclenche une réflexion, je trouve ça hyper positif ».

La vie associative lui offre la possibilité de s’éclater dans divers projets. « Il y a des évènements tout au long de l’année avec la parade de Noël en point d’orgue ». En pleine saison, peu de répit. « L’apiculture c’est très physique. L’hiver j’aime courir ou marcher, passer un bon moment à bouquiner ou à rester tranquille chez moi. J’aime aussi les week-ends rando avec les copines ».

Le confinement n’a pas modifié ses habitudes de travail. « Je suis tout le temps dehors. C’était curieux de ne croiser personne sur les routes au départ ». Elle n’a pas la TV à la maison. « Je me tiens informée par la radio. C’est complètement oppressant de voir les problèmes de ce monde. Du coup, depuis le COVID je pense que j’écoute moins ».

Vanessa ne court pas après le développement de son exploitation. « J’ai envie que ma vie privée soit en accord avec ma vie professionnelle. J’ai l’impression d’être bien dans mes baskets, d’avoir trouvé un sens à ce que je voulais. Les abeilles et ma petite entreprise, c’est ma petite pierre à l’édifice pour la protection de l’environnement ».