S’il est un repaire d’artistes qui mérite le détour, c’est bien l’atelier de verrerie de Stéphanie et Valérien à Bourgenay. Ils ont fait leur chemin de verriers ensemble, depuis chez Baccarat, cristallerie à la renommée mondiale. Ils ne sont pas originaires du coin, mais Valérien avait fait une saison ici. « À l’époque j’étais en Savoie, mais quand j’ai su que Jean-Michel arrêtait, j’ai eu envie de revenir ici ».

Valérien est amoureux du verre depuis l’âge de 14 ans. « J’ai choisi ce métier parce que je n’avais pas envie de faire comme les autres. J’étais plutôt genre un peu cancre du fond de la classe. Et puis j’avais envie de bouger. Ce métier m’offrait tout ça ». Une passion autant qu’un métier. « C’est quand il sort du four que le verre offre une lumière unique que beaucoup aimeraient retrouver dans le verre froid. Lorsqu’il est fluide, en mouvement, il crache sa propre lumière orange. C’est magnifique. Je ne m’en lasse pas ». Et si Valérien avait fait un autre métier ? « Peut-être ferronnier dans les arts du feu ? ». Toujours une histoire de flamme.

La sienne, il l’a déclarée à Stéphanie. « C’était une des premières femmes embauchées en cristallerie ; peut-être la première ? Elles sont peu nombreuses à pratiquer ce savoir-faire ancestral ». Dans son atelier, Valérien est secondé par Mathieu, formé à l’atelier. Ses enfants n’ont pas choisi cette voie pour le moment. « Le plus grand s’oriente vers la pâtisserie, et sa sœur est encore trop jeune ».

A l’âge de quarante ans, il opte pour la permaculture dans son potager personnel. « Quand tu consommes deux tonnes de gaz par mois, tu sais tout de suite où en est ton bilan carbone. Et puis j’en ai eu marre de bouffer industriel. Je n’ai pas envie de travailler pour payer mon médecin. Ce mode de jardinage offre aussi beaucoup de liberté ; tu peux passer d’un truc à l’autre. Ça change du verre, beaucoup plus contraignant ».

La température monte un peu chez Valérien lorsqu’il est question de la pandémie. « C’est un vrai problème, pour nous, pour nos clients. En plus les mesures changent sans arrêt. Difficile d’avoir de la visibilité. C’était plus confortable il y a 20 ans que maintenant ». Même si, avec Stéphanie, ils font partie des verriers qui s’en sortent. « Notre implantation, avec beaucoup de vacanciers qui séjournent, est favorable. Il faut aussi savoir vendre les bons produits ».

Ce n’est pas tout à fait surprenant quand Valérien affiche une prédilection musicale pour le métal ou le rock. « J’aime Damien Saez et son côté anar. Ça bouscule l’ordre établi, et ça, ça me fait du bien ». Fait-il partie des gens heureux ? « Je ne sais pas. Ça me semble un peu vaporeux tout ça. J’identifie plus facilement la fierté que le bonheur, quand tu sors une belle pièce par exemple ».

Il considère cependant faire partie du camp des chanceux. « La chance, il faut la provoquer. Je voudrais juste encourager les mômes qui veulent faire ce métier. C’est une niche mais c’est possible. Y compris en conciliant le boulot avec sa vie privée ». Valérien ne néglige pas les liens amicaux. « Quand je suis revenu ici, les amis m’attendaient devant la porte. Il y a ici quelque chose de très fraternel ».